La défense civile rassemble des volontaires qui se mobilisent pour secourir bénévolement les blessés en Syrie.  Ces groupes, communément appelés « casques blancs », rassemblent des milliers de volontaires dans le pays. Ces volontaires se mobilisent après chaque bombardement, pour sauver des vies, en secourant les personnes encore sous les décombres. Ils risquent leur vie au quotidien, n’étant eux-mêmes pas à l’abri de bombardements ou d’attaques.

Oum Wahid a failli perdre la vie sous les décombres. Elle doit sa survie à l'arrivée des secouristes de la défense civile, juste après la destruction de sa maison par les avions du régime syrien, dans le quartier de Shaar, à Alep.

Elle se souvient encore du moment où les lumières se sont éteintes, où son mari a disparu en un éclair. Tout d'un coup, les débris l'entouraient de toutes parts et les flammes ont commencé à engloutir la maison.

"J'ai essayé de sortir de chez moi, dit-elle, mais les flammes m'en ont empêchée. J'ai crié de toutes mes forces pour demander de l'aide. La voix des voisins me parvenait. Ils me disaient de garder mon calme. Ils disaient que la défense civile allait arriver. Et c'est vrai. Ils sont arrivés. Ils ont percé un trou dans le plafond et m'ont sortie de là, saine et sauve."

Les casques blancs

Les forces du régime syrien emploient l'artillerie lourde dans le bombardement des zones contrôlées par l'opposition. Cela a créé un énorme besoin en matière de défense civile dans ces villes et quartiers. Toutefois, les efforts des secouristes pour sortir hommes, femmes et enfants des décombres ne rencontrent qu'un mince succès, étant donné le manque d'expertise et de matériel adéquat.

Divers groupes de "Défense Civile Libre" ont commencé à émerger en Syrie dès 2012. À la fin 2013, l'idée de créer un système de défense civile unifié a pris forme. Celui-ci était dirigé par un groupe d'activistes.

Ali Diab est l'un des fondateurs de la défense civile. Il décrit la phase initiale de lancement du projet : "Nous avons adressé des invitations à tous les responsables locaux de la défense civile, dans tous les gouvernorats du pays, afin de se réunir et d'élire ensemble un Conseil de Direction pour la défense civile syrienne. Ce Conseil a établi divers organes, et notamment un Comité des Finances, ainsi que sept bureaux dans différents gouvernorats du pays. Ce Conseil de la Défense Civile est aujourd'hui reconnu dans le monde. Les différentes organisations internationales l'appellent "défense civile syrienne."

Les bénévoles: colonne vertébrale de la défense civile

La plupart des agents de défense civile sont des bénévoles. Ils travaillent aux côtés de dissidents ayant choisi de quitter les rangs des forces du régime, d'après le directeur du Corps de Défense Civile libre, Raed Al Saleh.

Ces bénévoles ont reçu un entraînement avancé en matière de recherche et de secours des victimes,par des experts étrangers, en Turquie. Depuis la création de la défense civile, ils ont pu sauver au moins 12000 personnes suite à différentes attaques au sein du pays.

Toutefois, R. Al Saleh estime que le niveau d'entraînement est insuffisant au vu de la charge de travail que les secouristes doivent porter au quotidien. En effet, le pays subit l'équivalent d'un tremblement de terre de niveau 7.6 sur l'échelle de Richter, et il s'agit d'une crise qu'aucune équipe de défense civile dans le monde ne peut gérer avec succès.

Aussi, 25 secouristes de la région d'Idleb ont reçu un entraînement spécialisé pour faire face aux attaques à l'arme chimique et au gaz de chlore.

 

Quand les femmes portent le casque blanc

Dans ces circonstances difficiles où oeuvrent les jeunes secouristes de la défense civile, les femmes syriennes ont choisi d'être présentes par leur participation aux opérations de recherche et de secours. À Alep notamment, la défense civile compte des dizaines de jeunes femmes bénévoles dans ses rangs.

Hasnaa Chawaf est infirmière bénévole auprès de la défense civile à Maarat al Numan. Lors d'un entretien, elle nous expliquait que le travail se faisait : "En coordination avec des équipes d'hommes. Ceux-ci prennent les devants en matière de recherche, de sauvetage et d'évacuation des victimes. Notre rôle à nous commence avec la deuxième phase des secours, et en particulier avec le transfert des victimes vers des structures médicales spécialisées."

Les femmes peuvent jouer un rôle extrêmement important, notamment dans un environnement conservateur où il n'est pas facile pour un homme de sauver une femme ou une jeune fille blessée et de leur apporter les soins nécessaires.

"Nous avons demandé à recevoir un entraînement spécialisé, précise Hasnaa. Et nous l'avons effectivement reçu, en Turquie, avec des experts britanniques. Aujourd'hui, nous formons à notre tour de jeunes bénévoles de la défense civile."

Un chantier en cours, malgré des moyens limités

Les compétences de la défense civile varient d'une région à l'autre. Dans des régions assiégées par le régime, telles que Qaboun ou encore Douma dans la campagne de Damas, les secouristes manquent cruellement d'équipements, contrairement à ceux qui travaillent dans des zones frontalières du Nord du pays, particulièrement près de la frontière turque. Les équipes de ces gouvernorats disposent de matériel lourd grâce à l'Unité de Coordination de l'Aide (UCA) du gouvernement intérimaire.

À ce propos, explique Malek Homsi, responsable de la défense civile auprès de l'UCA : "En 2014, et dans le cadre du programme Hayat, mis en oeuvre dans les gouvernorats d'Alep, Idleb, Hama et Latakieh, la défense civile a reçu des équipements lourds d'une valeur de 6 millions de dollars, en plus des dépenses opérationnelles. Et cette campagne se poursuit en 2015."

Selon M. Homsi, les zones assiégées ont également reçu des fonds de la part de l'UCA, afin de leur permettre de s'équiper. Cependant, l'UCA ne paie pas de salaires aux secouristes de la défense civile. Il s'agit, en effet, d'une prérogative du gouvernement intérimaire. Toutefois, l'unité leur a fourni des paniers alimentaires pendant 3 mois : une forme de soutien moral, sans doute.

Le gouvernement intérimaire n'a pu fournir que des sommes limitées, afin d'encourager la défense civile à poursuivre son travail, chaque mois. Pour le responsable de la défense civile au sein du gouvernement intérimaire, cela s'explique par le gel de tout soutien extérieur au gouvernement. "Les coffres se sont vidés, précise-t-il. Mais nous avons tout coordonné avec la défense civile afin de déterminer leurs besoins, et nous essayons d'orienter les différentes organisations et autres donateurs à leur accorder le soutien nécessaire."

 

Lancée en 2013, Radio Rozana est diffusée à partir de Paris et de la ville de Gaziantep proche de la frontière syrienne (en Turquie). Cette radio est apolitique et areligieuse, et s’efforce de représenter une variété d’opinions, de sensibilités et de communautés en Syrie. Elle est diffusée à l’intérieur de la Syrie sur les ondes FM et sur internet. Hors de Syrie, cette radio est accessible sur internet