Cybercriminalité: le combat perdu d'avance?

La cybercriminalité internationale explose alors les Européens viennent d’inaugurer un nouveau "Centre d’expertise et de coopération" avec un nom digne d'un robot de la Guerre des étoiles : l' EC3... Les Américains, invités, ont "promis" de donner un coup de main. De leurs côtés, les ministres Manuel Valls et Fleur Pellerin ont eux aussi, lancé les hostilités.  Hum! Assurément, les gangsters du net ont du sentir le vent du boulet!

Pour les criminels, internet est une aubaine

Depuis la nuit des temps, c’est la même histoire : à chaque grande innovation, petites et grandes organisations criminelles s’en emparent et la détourne à leur profit. Et général, ils le font avec une efficacité telle que les forces de l’ordre rament derrière sans jamais parvenir à égaler les gangsters qu’ils pourchassent. Avec internet, on ne déroge pas à la règle: les criminels de tout poil ont tout de suite compris qu'ils avaient à leur portée un fantastique terrain de jeux. Face à eux, policiers de tous pays ont bien du mal à s’organiser, puisque que les règles ne sont pas harmonisées d’un pays à l’autre. Aussi l’inauguration vendredi 11 janvier d’un Centre européen contre la cybercriminalité (EC3) basé à La Haye sous la houlette d’Europol (l’institution qui regroupe les polices européennes) n’est pas un luxe. D’autant que dans ce cadre, les Etats-Unis se sont engagés à "coopérer sérieusement " avec cette nouvelle instance.

Un "machin" de plus?

Diplomates, ses concepteurs se sont empressés de préciser qu’il ne s’agissait pas pour eux "d’élucider les crimes à la place des polices nationale, mais d’offrir une expertise aux enquêtes et de coordonner les informations".  Pour y parvenir, l’EC3 a un budget de 4,6 millions d'euros pour 2013, avec pour priorité de traquer les organisations qui commercialisent des images de pédophilie, se livrent au "phishing" (vol de codes, de mots de passe et de données) et aux arnaques en ligne. Réalistes, John Morton, le directeur de l'agence américaine de l'Immigration et des Douanes (ICE) et Troels Oerting, qui dirige l'EC3, sont tombés d’accord sur le fait que "les (cyber) criminels auront toujours une longueur d'avance car par nature, ils ont plus d'argent que nous, plus de ressources, ils n'ont pas les limites légales que nous avons, et puis, ils sont cupides… Notre rôle est de réduire cet écart le plus possible".

10 millions de Français victimes par an

Et même pour ça il y a du pain sur la planche! Rien qu’en France plus de 10 millions de personnes auraient été victimes de la cybercriminalité en 2011. "La facture totale estimée à 2,5 milliards d'euros est en hausse de 38% sur un an  et la perte financière par victime est estimée à 247 euros, soit 57% de plus que la moyenne mondiale", selon le rapport annuel de la société de sécurité informatique Symantec. Cette étude mérite d’être mentionnée même si cette société est juge et partie puisqu'elle vend des systèmes de sécurité informatiques et peut avoir intérêt à créer un climat anxiogène. Mais leur constat rejoins celui des policiers spécialisés…

La cybercriminalité est un domaine tellement riche qu’il est difficile d’en faire l’inventaire. De la pédophilie à la grande délinquance financière, l’éventail est large.  Rien que pour les arnaques et escroqueries, il en existe de multiples formes! Il suffit de se rendre sur le site du Quai d’Orsay et de ses bons conseils à destination des résidents français en Afrique. De "l’arnaque aux sentiments"  à l’ "hammeçonnage" (technique utilisée par les fraudeurs pour obtenir des renseignements personnels auprès de sa victime), en passant par "l’arnaque à l’héritage"…  Ces combines redoutablement efficaces jouent sur l’innocence ou la cupidité des victimes ! Au bas de sa liste le ministère des Affaires Etrangères s’empresse d’ajouter qu’il ne peut rien faire pour les victimes, et certainement pas retrouver leurs arnaqueurs...

600 policiers spécialisés

C’est bien là le problème. Les polices des pays touchés sont en général démunies face à ces gangsters internationaux qui ne connaissent aucune frontière. En France, 600 policiers et gendarmes, spécialement formés aux nouvelles technologies, surveillent, chaque jour, les échanges sur Internet, a assuré aujourd’hui Manuel Valls alors qu’il présentait lui aussi son plan anticybercriminalité. Mais que représentent-t-ils à l’aulne de l’immensité de la toile et plus récemment des dérives réseau social Twitter gangrené par des messages racistes, antisémites et homophobes ? Ou de la passivité des grands opérateurs ? Les experts du ministère de l’Intérieur  se plaignent de l’insuffisance de la représentation de ces opérateurs en France (Facebook dispose, à Paris, d’un unique représentant pour toute l’Europe et Twitter n’en disposera, au mieux, qu’au cours du second semestre 2013). Il en va tout autant pour Apple et Google… Cette sous-représentation pose un vrai problème pour le traitement juridique des affaires criminelles. Par exemple lorsque les enquêteurs ont besoin de réponses rapides pour identifier les auteurs d’actes illicites. De toutes les façons, selon les policiers, les opérateurs se cachent derrière le premier amendement de la constitution américaine, pour s’opposer systématiquement  aux demandes d’identification des auteurs de propos racistes, antisémites ou faisant l’apologie du terrorisme! D'où les propos tenus hier par Manuel Valls, qui pointe un doigt accusateur vers Twitter, Google et compagnie... Déontologie contre intérêts financiers, doit- on se demander qui va gagner?