Six détails que vous ignoriez (peut-être) sur James Bond et son papa

Au cas où vous auriez passé les deux dernières semaines dans une cave, grande nouvelle : le nouveau James Bond, Spectre, sort mercredi au cinéma. L’occasion de revenir sur quelques anecdotes autour de la vie de 007, de son auteur, de son histoire et de son univers.

His name is Fleming, Ian Fleming

Bond n’est pas sorti de nulle part : son père littéraire, Ian Fleming, s’est largement inspiré de sa propre vie pour créer son héros. À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, Ian Fleming est repéré par les services d’espionnage de la Royal Navy qui apprécie sa maîtrise des langues (l’anglais bien sûr, mais aussi le français et allemand), son parcours de globe-trotter et son côté touche-à-tout : journaliste pour Reuters, agent de change, correspondant du Foreign Office à l’étranger… Aide de camp de l’amiral Godfrey, Fleming ne sera jamais un véritable agent de terrain mais puisera allègrement dans ses souvenirs de guerre pour construire l’agent secret le plus célèbre du monde.

Le méchant de James Bond était un authentique James Bond

En revanche, un acteur emblématique de la série a eu une vie nettement plus agitée que celle de Fleming : Christopher Lee, l’interprète du méchant Scaramanga, L’Homme au Pistolet d’Or [1]. Outre que Lee était le propre cousin de Ian Fleming et avait déjà failli jouer Dr. No, le moins qu’on puisse dire est que l’acteur avait un tout petit peu d’expérience de la guerre. Mais pas froide. Plutôt chaude.

Avant de devenir Dracula puis Saroumane, Christopher Lee fit partie d’un commando du Special Operations Executive, un service secret chargé d’aider les mouvements de résistance au nazisme en Europe. Lee participa à un nombre important de missions en Afrique du Nord et en Allemagne – toujours classifiées, mais on ne saute pas en pleine nuit en territoire nazi pour y chanter des cantiques… Une anecdote ? Alors qu’un des assistants lui expliquait sur le tournage comment maîtriser son adversaire, Christopher Lee lui jeta un de ses fameux regards charbonneux avant de lui expliquer de sa voix d’outre-tombe qu’il savait parfaitement comment briser les cervicales de quelqu’un, merci bien.

Opération Ruthless

La Seconde Guerre mondiale, c’est un peu le pays de cocagne des coups tordus, pour les services de renseignement. Les opérations plus ou moins fantaisistes se multiplient – dont celle que fut chargé de concevoir l’agent Ian Fleming : l’opération Ruthless (sans pitié), dont le nom pourrait sortir tout droit d’un de ses romans. Destinée à casser les codes de chiffrement des célèbres Enigma, les machines de chiffrement allemandes, l’opération Ruthless avait pour but de piquer les clefs de codage mensuelles aux forces allemandes.

L’idée ? Simple comme bonjour : faire décoller d’Angleterre un bombardier allemand capturé quelques semaines auparavant, avec à son bord un équipage de soldats anglais parfaitement bilingues, vêtus d’uniformes nazis. Fleming avait imaginé de lancer un faux appel de détresse, puis de faire amerrir l’avion à proximité du navire de sauvetage envoyé recueillir les naufragés. Ne restait plus qu’à s’emparer du navire - et des documents secrets de la Kriegsmarine, dans une nouvelle version du cheval de Troie… Un bien beau scénario que le Secret Service abandonnera, le jugeant officiellement impraticable [2]. Et dont s’inspirera très largement le film U-571, sorti en 2000, qui se contentera de remplacer l’avion par un sous-marin.

Merci Kennedy

Difficile d'y croire aujourd’hui, mais les romans de Ian Fleming firent plutôt un bide, les premières années. Enfin un bide… C’est sévère, mais reste que les premiers romans se sont relativement peu vendus. Casino Royale, porté depuis à l’écran à deux reprises, ne s’est écoulé qu’à 8 000 exemplaires l’année de sa sortie, en 1953.  C'est un président américain qui jouera les attachés de presse et fera réellement décoller la notoriété de 007. Et pas n'importe lequel : John Fitzgerald Kennedy. Dans un article de 1961 du magazine Life consacré aux dix romans préférés du Président, JFK mentionne Bons Baisers de Russie : décollage immédiat des ventes... L’année suivante, la sortie au cinéma de James Bond contre Dr. No, la première adaptation de ses romans, fera de Bond une star et de Ian Fleming un auteur à succès. L’ex-espion anglais n’en profitera pas longtemps : il meurt en août 1964, à 56 ans à peine.

Goldeneye et private jokes

Après avoir adapté les 14 romans de l’écrivain anglais, Hollywood en fut réduit à imaginer de nouveaux scénarios plus ou moins heureux. Et si Goldeneye (1995) ne devrait pas rester dans les mémoires comme le chef d’œuvre du siècle, il a au moins le mérite d’être un joli clin d’œil : Goldeneye est le nom de la villa que possédait Ian Fleming à la Jamaïque - celle où il écrivit tous ses livres. Une référence encore dans Le Monde ne suffit pas (1999) – ce n’est pas le titre d’un roman, mais la devise de la famille de James Bond. Ou plutôt sa traduction, l’original est en latin : "Orbis non sufficit".

Posez lentement cette bouteille de Martini

Ah, ce fameux cocktail de James Bond, le dry martini « au shaker, pas à la cuillère »… Mauvaise nouvelle, vous pouvez poser votre bouteille et décoller ce revolver de votre joue droite : il n’y a pas une goutte de Martini dans le martini de 007.

La vraie recette est nettement moins sucrouillouse : du gin ou de la vodka, et un bon vieux trait de vermouth… Dans Casino Royale, Bond annonce sa variante personnelle, le Vesper : trois mesures de gin, une mesure de vodka, une demi-mesure de Kina Lillet et un zeste de citron. Nettement plus velu…Le hic[3] ?  le Kina Lillet n’existe plus. La marque a changé de nom (Lillet tout court) et modifié la composition de son alcool en 1987. Et comme la marque de gin préférée de Bond (House of Lords) n’existe plus non plus, plus personne ne peut retrouver le mordant du véritable cocktail de James Bond…

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[1] Et au troisième téton.

[2] Un terme administratif plus courtois que le plus probable « sortez-moi ce guignol d’ici avec ses plans foireux à la graisse de hérisson ».

[3] C’est le cas de le dire.

Publié par jcpiot / Catégories : Actu