« Ne pourriez-vous pas considérer la possibilité de ma bite dans votre bouche ? »
C’est ainsi que mon mari m’a apostrophé la première fois. Si je ne n’avais pas trop bu ce soir-là, et surtout si je ne l’avais pas trouvé si beau, je lui aurais très certainement craché à la gueule.
Je n’ai pas compris tout de suite sa détresse. J’ai bien sûr adoré qu’il soit capable de me faire l’amour plusieurs fois dans une soirée, qu’il soit disponible à chaque instant. Je me suis aussi vite rendu compte qu’il avait une façon atypique de me baiser : sans me regarder, ni me parler. Les seules fois où sa bouche émet un son pendant le coït, c’est pour crier son éjaculation.
Mon mari jouit très fort. Parfois, il me fait mal quand il m’agrippe les fesses ou me mord les seins. Il est si excité qu’il oublie de se contrôler. Moi, ça me procure un certain plaisir, même si j’ai parfois l’impression d’être un objet.
Il me prend rapidement, dans des lieux parfois insolites. En réalité, je pense que son désir de jouir doit être éprouvé, quel que soit l’environnement où il se trouve, lui et sa bite. Un jour, nous avons fait l’amour à Monoprix. Nous étions si discret que je crois que personne ne nous a remarqué. Mais lorsque mon mari a crié, un vieux type errant dans notre rayon a tout de même sursauté.
C’est un peu plus tard que j’ai remarqué que je ne lui suffisais pas. En fait, je ne lui ai jamais suffit. Je l’ai surpris en train de se masturber devant un film érotique des années 70. Il m’a vue, mais n’a pas pu s’empêcher de finir.
Nous avons longuement discuté.
J’ai accepté ce qui pour lui est irrépressible, comme impossible à contrôler. En premier lieu, les masturbations effrénées. Ensuite, ses infidélités avec des inconnues rencontrées en soirées.
Et puis il y a eu ce « club ». Deux fois par semaine, il rejoint une bande de dégénérés accros au sexe. Certains ne sont excités que par le rapport anal, et d’autres, que quand on leur pisse dessus. Heureusement aucun ne bande pour des cadavres ou des petites filles.
Ne croyez pas que c’est une partie de plaisir pour mon mari. Même si pour moi cette situation est difficilement supportable, c’est pour lui un enfer. Il a perdu sa première femme et quatre emplois. Si je suis déprimée, je pleure, je vais courir ou j’appelle des amis. Mais si c’est lui qui angoisse, il éprouve le besoin d’éjaculer, ce qui le plonge encore plus dans le désarroi.
Il pense avoir déjà tout essayé pour arrêter. Mon mari est atteint du trouble « hypersexualité ».
L’hypersexualité est à la mode dans les cinémas : après Shame en 2011, cette année c’est au tour de Nymphomaniac (Vol. 1 et 2), ou encore Don Jon.
Dans la dernière version de la classification américaine des troubles mentaux (DSM 5), le trouble « hypersexualité » fait référence à une utilisation pathologique du sexe : temps très important consacré à la sexualité et préjudice sérieux sur la vie sociale et personnelle. La personne atteinte par le trouble est en grande souffrance morale. De plus, les réponses au stress sont principalement d’ordre sexuel. Malgré ses efforts, la personne n’arrive pas à contrôler ses « pulsions ».
Des risques sociaux (perte de l’emploi, rejet), familiaux (rejet, séparation), médicaux (infections sexuellement transmissibles) et psychologique (désarroi) sont associés au trouble.
L’hypersexualité concerne 5 fois plus d’hommes que de femmes.
Concernant le traitement, il est souvent conseillé une approche à la fois médicamenteuse qui peut aider à réduire l’appétence (certains antidépresseurs), et la psychothérapie individuelle, en couple, voire de groupe.
Pour en savoir plus sur ce trouble :