Les huit erreurs de Hollande

François Hollande au palais de l'Elysée (Paris) le 11 décembre 2012. (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

Le chef de l’Etat l’admet : l’année 2013 sera tres difficile. Certes, François Hollande – qui compte sur la reprise de la croissance américaine et la bonne tenue de l’économie allemande – est décidé à tout faire (« coûte que coûte ») pour réussir à inverser, d’ici la fin de l’année, la courbe du chômage. En attendant, les clignotants en France sont tous l’orange ou au rouge. Du coup, le climat global est pesant. D’autant que le président a commis huit erreurs, payées cash.

Erreur n° 1 : sous-estimer la crise

Fédérant durant sa campagne toutes les formes d’anti-sarkozysme, le candidat Hollande avait peu parlé, en revanche, de la crise historique que vit le pays et des conséquences qui allaient s’ensuivre pour les Français. Jusqu'à un certain point, au lendemain du 6 mai, le pays – la gauche en tête – a donc été pris de court. Symboliquement, un dossier capital est toujours en attente: la baisse des dépenses.

Erreur n° 2 : se tenir en retrait

Le tir a été, depuis peu, rectifié. Il n’empêche : pendant plusieurs semaines, soucieux de prendre le contrepied de « l’omniprésident Sarkozy » (dont il veut se différencier de façon systématique, ce qui devient presque drôle), Hollande s’est tenu sur les hauteurs, en tout cas à distance. Or la logique du quinquennat et le poids de la crise imposent que le président de la République soit en première ligne.  Avec son Premier ministre comme principal… collaborateur.

Erreur n° 3 : compliquer les relations avec Berlin

Agacé par le néo-sarkozysme supposé d’Angela Merkel, Hollande a fait un pari aventureux sur l’échec de cette dernière, aujourd’hui au zénith dans les sondages. A la place, il s’est intéressé – trop – à l’Espagne, à l’Italie… En tout état de cause, pour la France, la relation franco-allemande  est, depuis soixante ans, centrale, et doit donc échapper aux humeurs. A fortiori à toute forme de remise en cause.

Erreur n° 4 : ne pas imposer son autorité

Amoureux des synthèses, adepte des compromis, plus normand que nature, Hollande donne en permanence le sentiment d’hésiter, de ne pas savoir trancher. En ce sens, symboliquement, les relations d’une extrême complexité – euphémisme ! – entre sa compagne Valérie Trierweiler et Ségolène Royal, la mère de ses enfants, ont énormément nui à son image. Car il ménage en permanence l’une et l’autre, craignant leurs réactions, leurs egos. D’ailleurs, en a-t-on fini alors que la présidente de la région Poitou-Charentes, barrée une première fois par Trierweiler, fait à nouveau des offres de service?

Erreur n° 5 : avoir constitué une équipe de débutants

Sous prétexte de renouvellement, peut-être aussi avec le souci de ne pas avoir d’ennui avec les trop « fortes têtes » (y compris au PS où l’apprenti Désir a été finalement préféré au roué Cambadélis),  Hollande a constitué autour d’Ayrault, lui-même sans expérience ministérielle jusque-là, une équipe globalement… inexpérimentée. Conséquence immédiate : une collection de « couacs ». Conséquence plus profonde : le champ libre laissé aux grands corps de l’Etat et aux énarques (spécialement ceux de la « promotion Voltaire », celle du nouveau président).

Erreur n° 6 : autoriser dans la même équipe le oui et le non

Sur l’avenir de l’Europe ou sur celui du… nouvel aéroport de Nantes, les écologistes ne se sont même pas fait taper sur les doigts quand ils ont fait entendre leur « petite musique ». L’indépendantiste Arnaud Montebourg a été réprimandé, lui, quand il s’est mis à jouer sa propre partition mais, depuis, il a recommencé. Personne n’est sanctionné ou vraiment rappelé à l’ordre. Double risque : le flou, la cacophonie.

Erreur n° 7 : surdimensionner les questions de société

S’il est indispensable que les droits des couples homosexuels soient mieux reconnus et considérablement renforcés, était-il nécessaire – sauf à vouloir faire diversion – de transformer l’affaire, alors que le chômage s’amplifie et que la récession menace, en une guerre de religion gauche-droite, en partie artificielle ?

Erreur n° 8 : oublier la France "de droite"

Elu de peu le 6 mai à la tête d‘une France majoritairement de droite sur le plan idéologique (il y a eu un nombre considérable de bulletins blancs), François Hollande a paru oublier que le rapport de forces réel dans le pays n’était pas si favorable que cela à la gauche, même si elle détient la quasi-totalité des leviers de pouvoir. Une preuve de plus: le seul socialiste au bout de huit mois dont la popularité est toujours en hausse, c’est le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. Autrement dit, le plus droitier des socialistes, celui qui aura conduit la seule révolution réussie à ce jour depuis l’élection de Hollande: faire admettre à la gauche que l’insécurité, ce n’est pas seulement, comme on disait du temps de Jospin – le « sentiment d’insécurité ».

Huit erreurs que la « team Hollande » corrige progressivement, à vitesse variable. Mais cela suffira-t-il quand l’orage gronde et que – tout le monde l’admet – on assiste, bien au-delà d’une simple crise, à un changement de monde ? Clairement, Hollande, pour se hausser au niveau défi, va devoir forcer sa nature. En montrant l’exemple.

Publié par ddemontvalon / Catégories : Actu