Guerres en Irak. Causes et effets

Les chiffres de l’échec donnent le vertige. Le bilan de la guerre en Irak, de 2003 à 2011, est de 4486 morts et 32232 blessés américains. Près de 180 000 irakiens, civils et militaires tués. Les Etats Unis ont dépensé 2,2 trillions de dollars. Un chiffre qui pourrait atteindre les 6 trillions au fil des ans, en comptant les intérêts bancaires et les retraites diverses payés aux vétérans de ce conflit durant les années à venir. Tout cela pour occuper et reconstruire l’Irak et former une nouvelle armée de 200 000 hommes, avec 500 000 policiers et des dizaines de milliers de paramilitaires. Cet effort gigantesque est parti en fumée ces dernières semaines. Les djihadistes de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL, dont l’acronyme arabe est : « Da’ech ») ont mis en fuite les soldats entrainés par des conseillers américains, conquis les villes de Mossoul, Tikrit, Tal Afar, et s’approchent de Bagdad.
Une vision quasi mystique
Et voilà ! L’Amérique qui s’était lancée dans cette guerre pour désarmer Saddam Hussein et « lutter contre Al Qaeda », se retrouve avec l’embryon de califat bâti par les héritiers d’Osama Ben Laden. George W. Bush et ses conseillers néo-conservateurs voulaient, par le « nation building », transformer la carte géopolitique de Proche–Orient. Une vision quasi mystique d’une démocratie - sur le modèle européen- prenant souche en Irak. A l’époque, les dirigeants israéliens avaient applaudi. Pendant des décennies, ils brandissaient la menace d’un front oriental où les divisions blindées irakiennes viendraient franchir le Jourdain pour détruire l’État juif. Ces même conseillers américains avaient, en 1996, proposé à Benjamin Netanyahu, une nouvelle stratégie fondée sur l’abandon du principe « La terre contre la paix » dans les négociations avec les Palestiniens, et établir un nouvel équilibre des forces dans la région en… faisant disparaître Saddam Hussein. On voit le résultat. (cf. mon livre : Les années perdues, p. 33-35)
Des conseils à l'Amérique
Pour l’heure, Benjamin Netanyahu donne des conseils à l’administration Obama. Dans une interview récente à l’émission « Meet the Press » de NBC, il a déclaré : « Les Chiites radicaux soutenus par l’Iran et les Sunnites extrémistes menés par Al Qaeda sont des ennemis de l’Amérique et lorsque vos ennemis se combattent, ne renforcez ni l’un ni l’autre ! » Surtout, il ne faudrait pas, selon lui, que Washington coordonne sa politique en Irak avec Téhéran car : « L’objectif ultime au Proche Orient doit être d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique. » Et le Premier ministre israélien de critiquer les négociations qui se déroulent à ce sujet entre les puissances mondiales (le P5+ 1) et l’Iran. C’est sa principale préoccupation.
Inquiétudes
L’armée israélienne, elle, suit de très près les avancées des djihadistes de l’EIIL, surtout vers le plateau du Golan où ils ne sont pas encore parvenus en nombre. Le dernier incident, au cours duquel un adolescent israélien a été tué par un tir de missile, a été provoqué par les forces de Bashar Al Assad. La situation en Jordanie est beaucoup plus préoccupante, et, au ministère de la Défense à Tel Aviv, certains experts craignent une déstabilisation du Royaume Hachémite. D’après ce que l’on sait, les services des deux pays échangent leurs analyses. La propagation de l’idéologie de l’EIIL au sein de certaines populations, en Jordanie et chez les Palestiniens, les inquiète tout particulièrement. Et, cela ne fait que commencer…