En réponse à plusieurs commentaires tendancieux, voici quelques explications.
Sur le fond, en cassant le jugement relaxant Philippe Karsenty, la Cour de cassation a visiblement voulu envoyer un message : Si quelqu’un veut attaquer et diffamer un journaliste, qu’il ne compte pas sur l’aide d’un tribunal pour cela. La justice doit faire preuve d’indépendance. Et surtout, dans ce cas, en fondant leur décision sur l’illégalité de la présentation des rushes (demandée par la cour d’appel), les juges de la Cour de cassation, ont remis cette question à sa juste place.
Pour rappel, le 19 janvier 2006, Philippe Karsenty avait demandé à la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, de lui remettre « tous les enregistrements audiovisuels de l’ensemble des images tournées le 30 septembre 2000 […] constituant les rushes du reportage diffusé par Charles Enderlin dans le 20H du 30 septembre.. ». Cet organisme indépendant, rattaché aux services du Premier ministre, a pour mission de faciliter et contrôler l’accès aux documents administratifs. Mr. Karsenty s’est vu opposer un refus : « Sans se prononcer sur le caractère administratif dont se sont servis les journalistes pour réaliser ce reportage, la Commission estime qu’ils revêtent un caractère inachevé et sont en tout état de cause protégés par l’article 109 du code de procédure pénale relatif aux sources d’information des journalistes ».
« Caractère inachevé » Cela signifie que les rushes ne constituent pas le reportage définitif. Ce ne sont qu’une suite de séquences dont la continuité ne peut être vérifiée que par la lecture du time code de la cassette. Ce n’est en aucun cas une vidéo tournée par une caméra de surveillance. Les conspirationnistes ont donc beau jeu de manipuler les images de la mort de Mohammed al Dura en posant de fausses questions : « Pourquoi ne voit-on pas de sang ? Combien de balles ont elles été tirées ? La tâche rouge ? C’est un chiffon ! Etc. » Tout cela pour moins de deux minutes d’images tournées en plusieurs séquences… Bien entendu, en lançant le débat à ce niveau et avec l’aide de la Cour d’appel, les auteurs de la théorie du complot, savaient qu’il était impossible de les contredire. Talal Abou Rahmeh, sous le feu pendant 45 minutes, abrité derrière une camionnette blanche bloquée au milieu de la rue, ne pouvait que filmer de courtes séries d’images avec dans l’esprit le reportage qui sera diffusé le soir. Aurait-il su que, des années plus tard, son tournage serait au centre d’une telle aventure judiciaire, il aurait certainement tourné le plus possible. En l’occurrence, il était en fin de cassette et avec une batterie quasiment épuisée.
« Sources d’information des journalistes » déclare la CADA. Par définition, cela signifie que les rushes sont l’équivalent des notes d’un journaliste de la presse écrite. Ce n’est pas l’équivalent d’un procès verbal.