Début janvier, le gouvernement israélien avait posé un ultimatum aux 38.000 migrants africains recensés sur le territoire : partir, moyennant compensation, ou être emprisonné. Vivement critiqué, Benyamin Netanyahou a annoncé lundi un plan alternatif, négocié avec l’ONU, qui prévoit le départ d’une partie de ces réfugiés dans des pays occidentaux, et la régularisation de 16.000 autres. Avant de faire à nouveau volte-face dans la soirée.
Que prévoyait le nouvel accord ?
A l'origine, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) se chargera du départ de 16.250 migrants vers des pays occidentaux qui pourraient être le Canada, l’Allemagne et l’Italie – même si cette dernière a démenti lundi soir tout accord sur ce sujet. Un nombre similaire de réfugiés se verraient attribuer un statut de résident temporaire (5 ans) qui améliorera nettement leurs conditions de vie en Israël. Ces derniers seraient néanmoins dispersés dans plusieurs régions du pays, notamment dans des kibboutz agricoles en manque de main d’œuvre. En outre, une administration spéciale sera mise en place. Son but : réhabiliter les quartiers sud de Tel Aviv où s’étaient installés un grand nombre de migrants ces dernières années.
A quoi joue Netanyahou ?
Le précèdent plan voulu par le Premier ministre israélien lui avait valu de vives critiques au sein de l’opinion publique, clairement divisée. Comment son pays, conçu historiquement comme un Etat refuge, pouvait-il fermer ses portes à des demandeurs d’asile en détresse ? Suite à la mobilisation d’ONG dans la rue et à la Knesset, puis de rescapés de la Shoah, la Cour suprême israélienne avait ordonné la suspension de ce programme qui obligeait chaque migrant à accepter la somme de 3.500 dollars et un aller simple pour le Rwanda, sous peine d’être emprisonné dans un camp de détention. La plus haute instance judiciaire israélienne aurait alors exigé que soient envoyés des observateurs pour veiller au bon traitement des migrants dans leur nouveau pays d’accueil, ce qu’a refusé Kigali, y voyant une ingérence. Benyamin Netanyahou n’a eu donc d’autre choix que de renégocier un accord. Mais les termes du document, établis sans concertation, ont provoqué une levée de boucliers dans son propre camp politique. Menacé par les affaires et une possible inculpation pour corruption, le Premier ministre a sans doute voulu s’éviter une crise gouvernementale. Il a suspendu l’application du nouveau compromis, au grand dam de l’ONU.
Quelles sont les réactions politiques ?
Si la première décision du chef du gouvernement israélien a sonné comme une victoire pour les ONG en charge de la défense des migrants, cette dernière a été de courte durée. Cette cruelle désillusion s’explique par le mécontentement des partis nationalistes. Ainsi, le ministre de l’Education, Naftali Bennett, a très vite condamné un accord qui « encouragera l’immigration illégale » et qui fera d’Israël « un paradis pour les infiltrés » - appellation donnée aux migrants par la droite israélienne. La ministre de la Justice, Ayelet Shaked, avait pour sa part exigé que le plan concocté avec l’ONU soit soumis au vote du cabinet. Enfin, plusieurs chefs de conseils régionaux du Néguev, dont les localités sont désignées comme nouveau point de chute des migrants africains, refusent de payer le prix des balbutiements de Netanyahou sur ce dossier alors qu’ils se disent confrontés à des difficultés économiques. A l’arrivée, pour l’opposition israélienne, ce double revirement du Premier ministre est une nouvelle illustration de son incapacité à diriger le pays et à prendre des décisions. « Qu’est ce que va être en temps de guerre », se désole le chef du parti travailliste, Avi Gabbay.
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