Gaza : la situation peut-elle dégénérer ?

Les affrontements meurtriers de vendredi (17 morts coté palestinien) augurent d’une période de tensions entre Israël et le Hamas dont le point d’orgue se déroulera le 15 mai, en marge de la journée de la Nakba (« catastrophe », en arabe) marquant la création de l’État hébreu. A chaque explosion de violences plane le risque d’une nouvelle escalade militaire que, pour l’instant, ne souhaite provoquer aucun des deux belligérants. Décryptage.

Le Hamas à quitte ou double
En difficulté sur la scène palestinienne et régionale, le mouvement islamiste est à l’origine de la « grande marche du retour », préparée de longue date et supposée monter en puissance au fil des semaines. A première vue, le Hamas a rempli ses objectifs : mobiliser des dizaines de milliers d’habitants de Gaza alors qu’on le dit détesté par la population ; attirer à nouveau l’attention de la communauté internationale, inquiète d’un possible embrasement, montrant ainsi qu’il est un interlocuteur légitime pour faire entendre la cause palestinienne. Si, dans les prochains jours, les heurts devaient s’étendre à la Cisjordanie, la victoire du Hamas serait totale et apparaîtrait comme un cruel retour de bâton pour le président palestinien Mahmoud Abbas. Celui-ci avait menacé Gaza de nouvelles sanctions pour forcer le Hamas à se soustraire à son autorité. Reste qu’en attisant les violences à la frontière israélienne, l’organisation islamiste prend le risque de provoquer un nouveau conflit militaire qui pourrait lui être fatal. Il n’est pas exclu que la colère dirigée actuellement contre Israël finisse par se retourner contre lui tant la détresse est grande dans la bande de Gaza.

Le prix à payer pour Israël
L’armée israélienne a rempli la mission qui lui avait été confiée : empêcher coûte que coûte l’invasion de son territoire par des groupes de manifestants dont certains, en témoigne des vidéos abondamment relayées par ses services de communication, ont tenté de mener des attaques armées. Reste que les images et le lourd bilan de cette première journée d’affrontements (17 morts, 700 blessés) renvoie Israël à ses vieux démons. Choquée par l’usage massif de munitions à balles réelles par les soldats israéliens, l’Union européenne a appelé à l’ouverture d’une enquête indépendante. Après une réunion du conseil de sécurité de l’ONU, le président turc Recep Erdogan a fustigé l’attitude « inhumaine » d’Israël. Placé sur le banc des accusés, l’État hébreu a rappelé qu’il défendait l’une de ses frontières et donc sa souveraineté, précisant aussi que deux tiers des victimes palestiniennes étaient membres d’«organisations terroristes », à l’instar du Hamas et du Jihad islamique. A l’exception du parti d’extrême-gauche Meretz et de la Liste arabe unifiée qui a appelé à des manifestations en Galilée, la classe politique israélienne fait bloc derrière son armée.  

Le pire est peut-être à venir
Tous les regards sont à présent tournés vers le mardi 17 avril qui marque la « journée des prisonniers » côté palestinien et pourrait servir de prétexte à de nouvelles manifestations en lisière de la bande de Gaza. En coulisses, les chefs politiques du Hamas assurent ne pas vouloir d’une escalade. Mais la branche militaire de l’organisation, défiée par la surenchère d’éléments plus radicaux - en particulier les salafistes -, menace d’une « explosion ». L’armée israélienne va maintenir son état d’alerte dans les prochaines semaines et a déployé ses batteries « dômes de fer » en prévision d’éventuels tirs de roquettes. Elle promet une riposte plus massive si le Hamas poursuivait ses « provocations ». Sur la scène diplomatique, l’Égypte aurait engagé des contacts pour tenter d’éviter le scénario du pire.  

 

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