Isolée et confrontée à une grave crise humanitaire, l’organisation islamiste palestinienne a fini par céder aux pressions de Mahmoud Abbas. Véritable renoncement à l’exercice politique et aveux flagrant d’échec après dix ans de règne chaotique? Ou volonté de revenir, sans état d’âme, à la lutte armée contre Israël ?
Une organisation à bout de souffle
Depuis son putsch de 2007, le Hamas n’aura finalement connu que des déconvenues. Un blocus imposé par Israël, suivi de trois confrontations militaires qui n’ont amené que désolation et destruction à Gaza. Le mouvement islamiste en a perdu son aura auprès de la population palestinienne. La brouille avec l’Egypte, née de son lien historique avec les Frères musulmans, puis de sa connivence avec certains groupes djihadistes dans le Sinaï, n’a fait qu’accroitre son isolement régional. L’Arabie Saoudite et le Qatar ont tour à tour cessé leur perfusion financière. Les récentes pressions d’un Mahmoud Abbas revanchard ont sans doute donné le coup de grâce aux islamistes. Son refus soudain de s’acquitter des factures d’électricité du Hamas a contraint Israël à réduire de moitié ses livraisons de carburant à Gaza, aggravant de fait la crise humanitaire. La situation devenait intenable.
L’Egypte, nouveau patron ?
L’annonce du Hamas intervient après un nouveau round de négociations au Caire où les services de renseignements égyptiens ont joué les médiateurs entre l’organisation islamiste et le Fatah. La première phase des négociations concerne la mise en place d’un gouvernement d’unité national maintes fois promis dans le passé. Ensuite, des élections générales devraient se tenir à Gaza et en Cisjordanie, où le Hamas dispose de bastions forts à l’instar de la ville de Hébron. L’Egypte, qui aspire désormais à normaliser ses relations avec les islamistes palestiniens - le Hamas lui a livré plusieurs dizaines de militants salafistes réfugiés dans son territoire ces dernières semaines - sans donner trop de gages à Mahmoud Abbas, ambitionne de placer à Gaza le redoutable Mohamed Dahlan, ancien chef de la sécurité palestinienne. Bien que persona non grata en Cisjordanie, il est perçu comme un possible successeur du raïs palestinien.
Pour Israël : à quitte ou double
En acceptant de faire jeu égal avec le Fatah, le Hamas parait contraint de modérer son refus de tout dialogue avec Israël, alors que celui-ci est prôné par l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas. Dans les faits, rendre les clés du pouvoir à Gaza n’implique aucunement le désarmement du Hamas, ce que souhaite l’Etat hébreu. Au contraire, le mouvement islamiste palestinien s’est dernièrement rapproché de l’Iran qui lui octroie un soutien financier et militaire. Les responsables israéliens voient ce rapprochement d’un mauvais œil, d’autant qu’il s’accompagnerait d’une implantation du Hamas au Liban où se trouve déjà le Hezbollah, érigé comme la principale menace pesant sur leur pays. Cette alliance contre-nature présage-t-elle de l’ouverture d’un double front? Dans l’échiquier politique israélien, certaines voix jugent plutôt qu’une opportunité est en train de se dessiner avec le Hamas, émergeant comme une force pragmatique. Peut être la dernière chance d’éviter une nouvelle guerre.
Suivez France 2 Moyen-Orient sur Facebook