Décryptage: au sud de la Syrie, une trêve où se joue l’avenir de la région

Négocié entre la Russie et les Etats-Unis, une première, le cessez-le-feu entré en vigueur ce dimanche dans trois provinces du sud syrien illustre toute la complexité d’une sortie de crise et de ses éventuelles répercussions. Plus qu’un test pour le régime d’Assad et les groupes rebelles, l’accord sera observé de près par la Jordanie, impliquée dans les discussions, et par Israël, qui espère voir les Iraniens et leurs milices s’éloigner de sa frontière.

La Russie envoie un message…
Deux ans bientôt après avoir changé le cours de la guerre en volant au secours des forces pro-Assad, Moscou prouve sa capacité à peser tout autant dans le jeu diplomatique. Pour cela, le président russe, Vladimir Poutine, n’a pas hésité à brouiller les cartes. Ses alliés syriens et iraniens ont été les premiers surpris - et probablement frustrés - de l’entente avec l’administration de Donald Trump. L’entente russo-américaine pourrait ouvrir de nouvelles perspectives, par exemple au nord de la Syrie, une région que la Turquie dispute aux Kurdes. 

… et joue sa crédibilité
Si, officiellement, le régime d’Assad se dit satisfait de la trêve obtenue à Qouneitra, Soueida et Deraa, berceau de la revolution, il n’a pas sans doute pas renoncé à la reconquête de ces provinces. Acculés, les rebelles du “Front Sud”, principalement composés de groupes islamistes et de quelques factions de l’armée syrienne libre (ASL) ne se disent pas concernés par l’accord. Pour veiller au cessez-le-feu, le chef de la diplomatie russe, Sergeï Lavrov, a promis l’envoi d’unités de la police militaire, en provenance de Tchétchénie. En cas de violation, Moscou semble condamné à répondre avec fermeté. Mais expose aussi ses soldats à des actions de guerrilla. 

L’Iran, hors-jeu?
La République islamique ne s’oppose pas à la création de zones de désescalade. Mais dans le sud, elle en a été exclue, à la différence des autres régions syriennes où ce processus est engagé. Cette mise à l’écart répond aux inquiétudes de la Jordanie qui voit d’un mauvais oeil la tentative iranienne de reconstituer un “axe chiite” à ses portes. En avril dernier, dans une interview accordée à la presse américaine, le souverain hachémite Abdallah II avait souligné les “problèmes” suscités par l’ingérence iranienne dans la région. Ses propos avaient provoqué des tensions diplomatiques avec Téhéran.

Israël n’a pas dit son dernier mot
Et si la trêve dans le sud syrien dépendait d’abord de l’attitude de l’Etat hébreu? Ses responsables ont accueilli le cessez-le-feu avec beaucoup de réserve. Et l’armée israélienne assure qu’il n’entravera pas sa liberté d’action contre toute tentative d’installation de l’Iran ou du Hezbollah à sa frontière avec la Syrie, le long du Plateau du Golan. Cette “ligne rouge” semble non négociable. Russes et Américains l’ont nécessairement pris en compte, afin de ne pas voir leurs tentatives de règlement du conflit syrien voler en éclats.

 


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