Les Anglais font du ski

Une séance de ski à roulettes dans Hyde Park.

Loin des montagnes et rarement enneigée, la capitale britannique est pourtant le nouveau terrain de jeu des skieurs.

Equipements à la main, les skieurs débutent leur séance de ski à roulettes.

Ce matin-là, il pleut sur Hyde Park. Sous les amas de feuilles mortes, le bitume imprégné d’humidité ne décourage pourtant pas un petit groupe de sportifs plantés sur leurs skis à roulettes. « Seule la neige nous empêcherait de skier ! » assure Jordan, le moniteur. Après avoir brièvement testé leur équilibre, encore précaire pour certains, les skieurs débutent leurs slaloms entre les marronniers du parc, croisant ici et là écureuils et pigeons. Le groupe évolue dans un décor bien citadin où grouillent incessamment passants, cyclistes et black cabs. Mais, la déconnexion semble bel et bien être au rendez-vous. « Le ski à roulettes, c’est mon objectif pour l’hiver », déclare Laura, cheveux et k-way trempés, pleine d’enthousiasme pour sa troisième séance. Voilà bientôt un an que cette énergique canadienne a emménagé sur Londres. Lorsqu’elle vivait à Toronto, la trentenaire faisait du ski de fond tous les samedis. Mais depuis, les sorties en plein air, même par mauvais temps, lui manquent. Cette année, Laura a donc décidé de rejoindre Rollerski, un club de ski à roulettes pour Londoniens motivés à parcourir les chemins qu’offrent les espaces verts de la capitale britannique, notamment ceux de Hyde Park et de Victoria Park.

Laura participe à sa troisième séance de ski à roulettes, coachée par Adam, son moniteur. 

Ni sapins, ni marmottes

Posté derrière la camionnette, Iain Ballentine distribue d’ailleurs le matériel aux nouveaux participants. En 2006, ce nord-irlandais originaire de Belfast a fondé Rollerski. «  Mon oncle était un adepte de biathlon, c’est lui qui m’a initié au ski à roulettes », confie Iain Ballentine, qui pratique ce sport depuis ses treize ans. « Nous nous entraînions sur une grande allée en pleine campagne, se remémore-t-il, seuls les animaux pouvaient assister à mon entrainement, ce qui n’était pas plus mal. Quand on est ado, on manque parfois un peu d’assurance ! » Pour le fondateur du club, le ski alpin reste plus populaire chez les londoniens que le ski de fond. « Avant, ce dernier était essentiellement perçu comme un sport de vieux, adapté à ceux qui ne se sentaient plus capables de descendre les pistes de ski alpin », reconnaît Iain Ballentine qui affirme que l’image du ski de fond a considérablement évolué au Royaume-Uni. « Il est aujourd’hui associé aux personnes en bonnes conditions physiques » précise le sportif qui s’entraîne, lui, trois à quatre fois par semaine. « Et puis, l’équipe britannique de ski de fond se débrouille bien », ajoute-t-il fièrement. Iain Ballentine en est persuadé : « nos athlètes ont incontestablement changé le regard que nous portons sur ce sport ».

Iain Ballentine, fondateur de Rollerski, devant le "bureau mobile" du club, la camionnette qui transporte les équipements des skieurs.

Skier, un sport citadin

Sous un imposant massif montagneux suisse, une photographie géante qui tapisse les murs d’une salle de sport du quartier de Fulham, quelques skieurs et snowboarders s’élancent. Certains sont des débutants venus s’entraîner pour le grand jour, celui où ils dévaleront des pistes de stations européennes. D’autres, déjà bons skieurs, souhaitent perfectionner leur technique. Leur terrain de jeu ? Un tapis roulant synthétique, de neuf mètres de long sur cinq mètres de large, qui plonge d’ailleurs la pièce dans un vrombissement sans fin. Pour skier ? « Un jean suffit », s’amuse Daniel Crawford, le manager de Chel-ski, le centre de ski intérieur. Cet anglais de 27 ans a d’abord enseigné au Canada sur des pistes extérieures, avant de se retrouver moniteur à Londres. « A quatre ans, je détestais pourtant ce sport », se rappelle-t-il avec humour, « j’étais un enfant maladroit ! »

Daniel Crawford, manager et moniteur à Chel-ski.

Si, de Glencoe à Glenshee, l’Ecosse compte cinq principales stations de ski, la neige n’y est pas toujours au rendez-vous. « Là-bas, la météo est venteuse, pluvieuse, voire glaciale », admet le professeur de ski. « Les stations écossaises restent essentiellement fréquentées par la population locale. » Issu d’une famille de skieurs, Daniel Crawford en est sûr : « l’intérêt que l’on porte à ce sport dépend surtout de si l’on a grandit avec ou pas. Beaucoup de britanniques ne skient pas car leurs parents n’ont jamais skié. D’ailleurs, un certain nombre de nos clients ne s’y sont mis que tardivement, à partir de la trentaine ou de la quarantaine ». Si Daniel Crawford estime que le ski n’est pas tant ancré dans la culture britannique, il reconnaît que l’intérêt qui lui est porté va grandissant. En 2016, le Royaume Uni était pourtant le 2ème exportateur européen de skis et de snowboards, après l’Autriche.

Un article de Alizée Mosconi, avec Arnaud Comte. 

 

Publié par Bureau de Londres / Catégories : Non classé