Alors que Theresa May est sur le point, ce mardi, d'évoquer un Brexit « dur » qui passerait par un retrait du marché unique européen et de l’Union douanière, il ne faut pas pour autant penser que seuls les secteurs bancaire et financier peuvent en pâtir. Le géant suédois Ikea, qui cherche à être totalement indépendant dans les énergies renouvelables d’ici 2020, vient d’annoncer qu’il refusait d’investir les 600 millions d’euros prévus dans ces énergies au Royaume-Uni, tant que le gouvernement ne changerait pas sa politique énergétique. Le secteur environnemental est donc directement impacté, et les incertitudes liées au Brexit y sont pour beaucoup.
Au lendemain du référendum, le nouveau gouvernement britannique a d’abord supprimé son secrétariat d’État au Changement climatique, puis a déclaré vouloir réduire considérablement les subventions accordées à l’énergie solaire - à hauteur de 85 % selon le spécialiste Paul Ekins -, ce qui n’a pas manqué de confirmer que les enjeux climatiques et environnementaux n’étaient pas la priorité du nouveau gouvernement.
Cette position décourage inévitablement les investissements étrangers en la matière. Joanna Yarrow, responsable de la durabilité de l’entreprise au Royaume-Uni, explique au journal The Huffington Post que « le demi-milliard de livres supplémentaire à investir d’ici 2020 ne viendrait pas au Royaume-Uni. », alors que le groupe a pourtant déjà investi dans le monder entier un milliard et demi d'euros, dans le but de devenir, à terme, complètement indépendant énergétiquement.
Mais selon elle, le Royaume-Uni a beau avoir « des ressources éoliennes très importantes, faisant de lui un des meilleurs endroits dans le monde pour générer de l’énergie via le vent, le contexte n’encourage pas cet investissement ». « Nous devons donc la prendre ailleurs » conclut-elle.
Le cabinet d’audit britannique Ernst & Young vient prouver cette perte d'attractivité britannique dans ce secteur puisqu'il estime que le pays est passé, au classement sur le marché des énergies renouvelables, de la deuxième place en 2007 à la treizième en 2016.
L’association Greenpeace juge quant à elle que cela confirme une politique gouvernementale britannique sur les énergies renouvelables « désastreuse ». Selon Kate Blagojevic, responsable de l’énergie pour Greenpeace au Royaume-Uni, il est nécessaire « d’ouvrir ses frontières aux investisseurs comme Ikea pour soutenir les énergies renouvelables qui favoriseront des prix concurrentiels, la création de nouveaux emplois et la réduction des émissions de carbone. »
A titre de comparaison, Ikea détient en France six parcs éoliens depuis que l’entreprise en a acquis trois nouveaux en décembre dernier, ce qui lui permet de « couvrir 143% des besoins énergétiques de Ikea France » selon la directrice française du développement durable, Carole Brozyna-Diagne. Le Royaume-Uni prend donc du retard quant aux ambitions climatiques mondiales, et le Brexit pourrait même compliquer la ratification de l’accord conclu lors de la COP21 à Paris en décembre 2015, ce dernier ayant été signé par l’Union Européenne des 28 en tant que telle.
Marine Clerc avec Loïc De la Mornais