La nouvelle fait grand bruit outre-Manche. Elles avaient été progressivement fermées. Il n'en reste qu'une centaine dans le pays. Depuis le début de la semaine, l'éventualité d'ouvrir de nouvelles "grammar schools", des écoles sélectives, anime les débats en Angleterre.
Un changement de règle pourrait permettre aux écoles britanniques de devenir des "grammar schools", c'est à dire des écoles sélectives, avec un quota d'élèves issus des milieux défavorisés. Et la décision est vivement critiquée. Justine Greening, secrétaire d'État à l'Éducation a reconnu qu'il y avait un "débat sensible" sur la question. D'après elle, augmenter le nombre d'établissements de ce type permettrait de "propulser des enfants brillants issus des milieux modestes". De son côté, le parti travailliste a déclaré que les ministres montrent une "dangereuse incompréhension" des problèmes auxquels font face les écoles en Angleterre. Selon Michael Wilshaw, inspecteur en chef des écoles, le Royaume-Uni "échouerait en tant que nation " en réintroduisant les "grammar schools" :
"Nous échouerons en tant que nation si seulement 15 à 20% de nos enfants réussissent à l'école. Il faut que l'on fasse en sorte que plus d'élèves aient de bons résultats. J'ai peur que de les séparer à 11 ans entre ceux qui réussissent le test d'entrée et ceux qui échouent, car cela va arriver, nous empêchera d'atteindre cette ambition"; a déclaré Michael Wilshaw.
Quid des "grammar schools" ?
Les "grammar schools" (littéralement "écoles de grammaire"), sont des établissements secondaires publics typiquement anglais basés sur les aptitudes scolaires de leurs élèves. Créées au Moyen Âge pour enseigner, comme leur nom l'indique, la grammaire latine, ces établissements sont devenus publics après la seconde guerre mondiale, et sont réservés aux meilleurs élèves, soumis à un examen d'entrée. La plupart de ces établissements ont été progressivement fermés entre les années 1960 et 1970, selon la volonté du parti travailliste, laissant place aux "comprehensive schools", ouvertes à tous et sans sélection. En 1998, le parti travailliste de Tony Blair, ancien Premier ministre britannique, avait voté une loi interdisant la construction de nouveaux établissements de ce type. ll ne reste aujourd'hui plus que 163 "grammar schools" en Angleterre, et 69 en Irlande du Nord, d'après la BBC. En revanche, il n'en existe aucune en Écosse ni au Pays de Galles.
Si l'examen de sélection ("11-plus selection exam"), est aujourd'hui aboli au Royaume-Uni, des examens, basés sur le volontariat, sont toujours en vigueur dans les régions où des grammar schools publiques existent encore, notamment dans le Devon, le Dorset, et le Kent, et même dans certains quartiers de Londres.
Des établissements controversés
Leurs détracteurs accusent ces établissements d'être trop élitistes et de renforcer les inégalités, en excluant les enfants issus des milieux les plus défavorisés. Ses défenseurs, quant à eux, affirment qu'au contraire, ils encourageraient et renforceraient la méritocratie. Les élèves recevraient ainsi une bonne éducation, davantage basée sur leur mérite plutôt qu'en fonction des revenus de leurs parents.
La Première ministre britannique Theresa May s'est exprimée ce vendredi matin lors d'une conférence de presse. Elle a insisté sur le fait que les "grammar schools" permettraient d'instaurer un "système méritocratique". D'après elle, il faut augmenter le nombre de places dans ces écoles pour toutes les familles, et étendre l'âge d'admission à 16 ans. Aussi, les "grammar schools" devront participer financièrement à la mise en place d'écoles gratuites sans sélection. L'objectif est d'effacer progressivement le système scolaire binaire, divisé entre "grammar" et "comprehensive schools" pour favoriser la diversité.
Camille Soligo avec Clément le Goff