Un plaidoyer pour la défense des réfugiés : quand William Shakespeare s’en mêle

Manuscrit du "Livre de Thomas More" (British Library)

Oui, vous avez bien lu, nous parlons bien de cet écrivain anglais né… en 1564 ! Le parallèle est troublant, preuve que l’afflux de réfugiés en Grande-Bretagne était déjà d’actualité il y a plus de trois siècles…

Ils n’étaient ni Syriens, ni Irakiens mais bien Français ! Les réfugiés de l’époque, les Huguenots, étaient persécutés à cause de leur protestantisme, et avaient trouvé l'asile chez leurs voisins les Anglais… Qui eux, réclamaient leur expulsion.

C’est ce que nous apprennent les quelques pages d’un réquisitoire rédigé par William Shakespeare, entre autres, disponible le mois prochain à la British Library de Londres à l’occasion de la rétrospective de l’auteur.
Le texte, issu de la pièce « Le Livre de Thomas More », relate les tensions on ne peut plus vives, dues à l’afflux de réfugiés français à la fin du XVIe siècle.

Face à l’appel désespéré des émeutiers anglais, un lord, Thomas More (héros imaginaire de William Shakespeare), s’oppose aux clichés anti-immigration, implorant les Londoniens de faire preuve de davantage d’empathie et d’humanité envers les Français. Nous vous avons sélectionné un passage :

« Vous les mettez à terre, les tuez, leur tranchez la gorge, possédez leur maisons, Hélas, hélas ! Dites-le désormais au Roi, aussi clément soit-il, si l’agresseur se lamente, mais si vous deviez être bannis, où iriez-vous ? Dans quel pays, par la nature de votre erreur, devrez-vous donner votre refuge ? Iriez-vous en France ou en Flandres, ou en quelque province allemande ? […] Non, nulle part n’adhère à l’Angleterre, où vous seriez nécessairement étrangers. »

 

William Shakespeare (shakespeare.mit.edu)

William Shakespeare (shakespeare.mit.edu)



Dans le Guardian, Zoé Wilcox, la conservatrice de la British Library se confie : « C’est un manuscrit vraiment émouvant. Dans le fond, c’est vraiment un texte empathique. [Thomas] More encourage les foules à comprendre les migrants. Il en appelle à leur « montagne d’inhumanité. »

Tout semble prouver que l’écriture est celle de Shakespeare, indique la conservatrice. Si tel est le cas, ce manuscrit serait ainsi unique en son genre : « tout ce que nous avions, c’était un ensemble de six signatures authentiques de l’auteur, donc c’est vraiment incroyable. »

Trois cents documents numérisés des archives de la British Library seront exposés au grand public à partir du 15 avril prochain, à l’occasion du 400e anniversaire de la mort de William Shakespeare.

Emmanuelle Rouillon avec Loïc de La Mornais 

Publié par Bureau de Londres / Catégories : Non classé