A Londres, depuis le week-end dernier, six manifestations de soutien à Gaza ont été organisées; elle se sont déroulées sans heurts. Demain, samedi 26 juillet, un nouveau rassemblement prendra forme devant l'ambassade d'Israël dans le quartier de Kensington. Le gouvernement britannique n'a pas évoqué de possible interdiction. En France au contraire, la manifestation pro-palestinienne prévue demain s'est vue interdite. Que faut-il savoir des manifestations à Londres, pourquoi le gouvernement britannique n'y voit-il rien à redire et pourquoi se déroulent-elles plus pacifiquement qu'en France ?
"Libérez, libérez la Palestine", "David Cameron, honte à toi", "Gaza, Gaza, ne pleure pas, nous ne te laisserons pas tomber"... Depuis une semaine, les rues de Londres, aux couleurs de drapeaux rouge, blanc, vert et noir, des manifestants apportent leur soutien aux habitants de la bande de Gaza, à coup de pancartes et de slogans. Mais sans violence.
Qui sont les organisateurs ?
Plusieurs organisations sont à l'origine des manifestations londoniennes. Les principales sont "Palestine Solidarity Campaign" ainsi que la coalition "Stop the War". L'événement qui a rassemblé le plus de monde - 100 000 personnes - a eu lieu samedi 19 juillet. Aucun heurt majeur n'a éclaté à cette occasion, seuls les évanouissements d'une dizaine de personnes dans la foule ont été à signaler. "C'était une manifestation nationale, explique Rabia Khan, porte-parole de Stop the War. Des manifestants venaient de partout en Angleterre, pas seulement de Londres."
Selon Sarah Colborne, directrice de Palestine Solidarity Campaign, cette manifestation "a donné l’opportunité aux Britanniques de l’ensemble du pays de dire que ça suffit, le siège de Gaza par Israël et son occupation de la terre palestinienne doivent cesser maintenant."
Les organisateurs de la manifestation de demain ne sont pas capables de prédire le nombre de personnes qui se rassembleront devant l'ambassade d'Israël demain.
Que revendiquent les manifestants de Londres ?
Exactement la même chose que les manifestants de Paris ou des autres villes dans lesquelles des manifestations ont été organisées : l'arrêt des bombardements israéliens dans la bande de Gaza. En effet, le territoire palestinien, qui fait l'objet d'un blocus depuis 2007, est régulièrement sous le feu de raids israéliens lancés notamment pour faire cesser les tirs de roquette contre l’État hébreu.
Les chaînes d'information en continu Sky News et BBC World n'ont pas couvert en direct la manifestation de samedi dans les rues de Londres, provoquant la colère de nombreux internautes sur les réseaux sociaux. "Si c’était une marche de la English Defense League (mouvement d’extrême-droite: NDLR), BBC aurait couvert en direct la manifestation", a ainsi écrit sur Twitter un certain Raf (@raf2340).
Pourquoi les manifestations se passent mieux à Londres ?
Londres est connue pour son "melting-pot"; l'historien Roy Porter l'a décrite comme "une ville d'étrangers". Les communautés musulmane, juive (importante au Royaume-Uni, environ 350 000 personnes, dont deux tiers à Londres), indienne ou encore chinoise se côtoient. Par conséquent, un certain communautarisme est visible. Même si cette tradition a des désavantages évidents, elle permet un certain respect entre les communautés. Ce multiculturalisme se retrouve même au sein de la classe politique. David Cameron a toujours proné "l'identité collective", comme une manière d'unir le pays, malgré les disparités des habitants. Qui plus est, la décolonisation n'a pas laissé en Angleterre des séquelles comparables à celles qui ont touché la France (à la suite de la guerre d'Algérie, notamment). Dès lors, outre-Manche, les rapports de force apparaissent comme moins exacerbés qu'en France, ce qui évite des débordements tels ceux qu'ont connus Paris et Sarcelle.
Pourquoi les rassemblements ne sont pas interdits à Londres ?
Outre-Manche, il n'est pas question d'interdire les rassemblements. Un porte-parole du Home Office, l'équivalent du ministère des Affaires intérieures, explique : "Le gouvernement britannique autorise les manifestations pacifiques. Elles font partie du fonctionnement d'une société démocratique, tant qu'elles ne vont pas à l'encontre des lois."
Rabia Khan, porte-parole de la coalition Stop the War, esquisse une explication : "Le nombre de gens qui se rangent du côté de la Palestine à Londres est impressionnant. Le soutien à Gaza est vraiment très fort, et très étendu. Ce serait vraiment très difficile pour le gouvernement de justifier l'interdiction d'une manifestation, aussi bien psychologiquement que concrètement, car le nombre de gens qui participent aux rassemblements pro-palestiniens n'est pas négligeable."
Que pensent les Anglais des interdictions en France ?
La députée travailliste Diane Abbott, qui a salué sur sa page Twitter "la plus importante manifestation palestinienne depuis des années", a dénoncé l’interdiction par le gouvernement français de la manifestation parisienne du week-end dernier : "Honte au gouvernement français qui a interdit une manifestation."
Quant à Rabia Khan, du collectif Stop the War, elle regrette les interdictions françaises : "A Londres demain, les citoyens pourront montrer qu'ils ne sont pas d'accord. En France, ils n'ont même pas ce droit. Que vont-ils faire ? Rester chez eux ? Je ne pense pas que cela améliorera la situation."
Céline Schoen avec Loïc de La Mornais