Vendredi 29 septembre, les dirigeants européens se sont retrouvés à Tallinn, pour un sommet « numérique ». Un dossier qui tient à cœur l’Estonie, champion mondial dans le secteur. Pour la France, ce sommet était l’occasion de réitérer sa proposition de taxation des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), un projet qui ne fait pas l’unanimité au sein de l’UE.
Tallinn, E-capitale de l’Europe
Pour le gouvernement estonien, il était légitime que le premier sommet européen consacré au numérique se déroule à Tallinn. En moins de trois décennie, ce petit pays d’Europe du Nord s’est imposé comme l’un des leaders du monde dans le domaine du numérique.
En Estonie « il faut dix-huit minutes pour démarrer une entreprise en ligne et trois minutes pour déposer une déclaration de revenus », peut-on lire sur le site officiel du gouvernement. Un sujet qui tenait donc à cœur le pays.
La taxation des géants du net, un sujet « d’intérêt général » pour la France
« Aujourd’hui le marché est dysfonctionnel », « nous souhaitons une régulation ambitieuse » des géants d’internet qui ne « respectent pas les règles du jeu » a déclaré vendredi Emmanuel Macron, lors de la conférence de presse à l’issue du sommet européen à Tallin.
Selon le rapport d’un député européen, l’UE aurait perdu 5,4 milliards d’euros en impôts de Google et Facebook entre 2013 et 2015, en raison de leurs mesures d’optimisation fiscale.
Le commissaire européen en charge du numérique Pierre Moscovici insiste : « il est anormal que Booking.com qui perçoit une taxe de 20% sur les nuitées, ne paye pas d’impôt sur la tertiaire européen ».
Pour le chef d’Etat français, il est urgent de soutenir « l’initiative d’une taxe de base sur la valeur créée dans nos pays », ajoutant qu’il s’agit d’un « sujet d’intérêt général », soutenu pro ou proue par dix-neuf pays de l’Union européenne, dont l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie.
La France propose depuis plusieurs semaines de taxer les GAFA sur la base de leur chiffre d’affaires réalisé dans chaque pays. « Il faut taxer la valeur crée là où elle est produite » avait déjà lancé Emmanuel Macron, lors de son discours à la Sorbonne, le mardi 26 septembre.
Des visions divergentes sur l’Europe du numérique
Empruntant la voie ouverte par Emmanuel Macron, la Commission européenne proposera en 2018, de nouvelles règles pour « une taxation équitable et efficace » des géants du numérique dans l’UE, a annoncé vendredi son président Jean-Claude Juncker.
Mais cette proposition de régulation, poussée par le chef d’Etat français qui souhaite construire un marché unique du numérique, ne fait pas l’unanimité au sein des Etats-membres. Plusieurs Etats, tels que Chypre, Malte ou l’Irlande, qui profitent de la concurrence fiscale dans l’UE, y sont foncièrement opposés.
« Si nous voulons que l’Europe devienne numérique, la solution ne passe pas par plus de taxes et de règles. En fait, c’est tout le contraire » a assené vendredi le Premier ministre irlandais Leo Varadkar, à Tallinn.
De son côté, le Président des Libéraux au Parlement européen (ALDE) Guy Verhofstadt, apporte sa solidarité à l’initiative française et constate qu’« à l’heure où les GAFA trustent la nouvelle économie et où la Chine se constitue des monopoles dans l’ancienne », l’UE aura besoin de champions européens.
Pascal Verdeau et Pauline Coiffard.