Martin Schulz quitte le Parlement européen. « Je ne serai pas candidat pour un troisième mandat de président du parlement européen. L’année prochaine je vais me présenter comme candidat aux élections législatives allemandes », a annoncé le président du Parlement européen lors d’un point presse à Bruxelles. « Ce n’était pas une décision facile à prendre », ajoutait-il, la larme à l’œil, alors que les pronostics pariaient davantage sur une nouvelle candidature de sa part.
Ardent défenseur de l'UE
Élu une première fois en 2012, le social-démocrate Martin Schulz est le seul parmi ses prédécesseurs à avoir assuré deux mandats d’affilée à la tête du Parlement, après une réélection en 2014. L’homme de 61 ans, originaire de l’ancienne Allemagne de l’ouest, est un « autodidacte » de la politique. Rêvant de devenir footballeur, à la suite d’une blessure, il doit abandonner cette voie et choisit de devenir libraire. À l’âge de 19 ans, il rejoint les rangs du SPD (gauche allemande). De 1987 à 1998, il est bourgmestre de Würselen (Rhénanie du Nord Wesphalie), seul mandat national qu'il exercera. En 1994, il se présente aux élections européennes. De là il gravit les échelons un à un, jouant un rôle dans les commissions parlementaires puis à la tête des groupes de partis.
On reconnait à Martin Schulz le fait d’avoir contribué à renforcer le Parlement. Par sa personnalité bien trempée d’abord : l’Allemand s’impose dans tous les meetings et serre la main des grands chefs d’État. Il est connu pour ne pas avoir sa langue de sa poche et n’hésite pas à critiquer les exécutifs nationaux. Ardent promoteur de l’UE, il ne manque pas de rappeler son amour pour l’UE et pour l’institution parlementaire. Il avait bien tenté d’accéder à la Commission puis à la présidence de l’exécutif européen, sans succès.
C’est aussi un proche de Jean-Claude Juncker. Il est à l’initiative de la nomination d’un président de la Commission issu de la liste du groupe politique majoritaire dans l’hémicycle, rapprochant ainsi les deux institutions. Mais cette proximité est parfois reprochée à M. Schulz. En 2015, alors que J.C. Juncker est mis en cause dans le scandale LuxLeaks, Martin Schulz est accusé par plusieurs eurodéputés de court-circuiter les travaux de la commission spéciale sur les pratiques d’évasion et d’optimisation fiscale.
Retour à la politique
Sa décision de se tourner vers la politique nationale allemande peut surprendre alors qu'il n'a exercé qu'un poste d'élu local. Aux législatives de septembre 2017, il souhaite se présenter dans la course au Bundestag pour représenter le SPD dans son Land, la Rhénanie-du-Nord-Westphalie (un des Lander stratégiques du SPD). Par son expérience de la diplomatie et la maîtrise parfaite d'au moins six langues, il est également vu comme le candidat parfait pour remplacer l’actuel ministre des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, représentant social-démocrate, ce sur quoi Martin Schulz ne s’est pas exprimé.
Pourrait-il maintenant se présenter en tant que candidat SPD contre Angela Merkel à la Chancelerie ? La chancelière a récemment annoncé qu’elle se présenterait pour un nouveau mandat. Le parti du SPD doit choisir son candidat en janvier, et le nom de Schulz revient souvent.
Son départ de la présidence du Parlement ouvre désormais la question du successeur. Un pacte parlementaire scellé en 2014 exige que le prochain président du Parlement européen soit issu du groupe majoritaire, soit le groupe du PPE. Martin Schulz avait en effet dû négocier avec les députés conservateurs pour obtenir son second mandat.
Six noms reviennent régulièrement pour hériter du poste, dont celui du Français Alain Lamassoure, qui s'est déclaré candidat du groupe PPE pour le poste de président du Parlement européen. L'ancien ministre sous les gouvernements Balladur et Juppé (dont il est un fervent soutien) a fait valoir lors de l'annonce de sa candidature sa "longue expérience politique" en tant qu' "élu local, au gouvernement français (au ministère des Affaires étrangères et du Budget) et depuis 1999 au Parlement européen ". L’un de ses concurrents serait l’eurodéputé allemand, Manfred Weber, qui ne s’est pas encore déclaré. Une éventualité à laquelle Alain Lamassoure répond par la nécessité d’une « rotation des nationalités ». Parmi les autres candidats potentiels : l’italien Antonio Tajani, le slovène Alojz Peterle, l’irlandaise Mairead McGuinness et l’autrichien Othmar Karas. La date butoir est fixé au 13 décembre pour choisir un candidat parmi le groupe PPE.
Cette nomination d’un candidat PPE fait toutefois craindre un déséquilibre au sein des institutions. Commission, Conseil, et Parlement auraient alors un président du même groupe. Jean-Claude Juncker et Donald Tusk avaient d’ailleurs appelé au maintien de M. Schulz jusqu’aux prochaines élections européennes en 2019 pour maintenir la pluralité partisane.