Pour tout comprendre du (très complexe) système électoral allemand

Les Allemands ne font rien comme les autres, même en matière d'élections ! Le mode de scrutin pour désigner les députés du Bundestag et le futur chancelier, ou la future chancelière, semble d'une complexité sans nom. Mais grâce à cet article, vous allez tout comprendre. 

Angela Merkel ou Martin Schulz ? Qui sera le nouveau chancelier de la République fédérale d'Allemagne ? Réponse: le dimanche 24 septembre, enfin pas tout à fait. Car en Allemagne, élire un chancelier, c'est un peu plus compliqué que d'élire le président chez nous. Il ne suffit pas de mettre un nom dans une enveloppe et de compter. Dans l'isoloir, les 61,5 millions d'électeurs allemands se retrouveront face à une grande feuille blanche avec deux colonnes. Car ils disposent non pas d'une mais de deux "voix".

Première étape, élire des candidats "directs"

La colonne de gauche du bulletin de vote est la « Erststimme », la première voix. Dans cette colonne, les Allemands choisissent un candidat. Ils cochent le nom du candidat de leur circonscription (il y en 299 en Allemagne) qui devra les représenter à Berlin. Le candidat qui obtient le meilleur score de sa circonscription siègera directement au Bundestag. Il s'agit donc là d'un scrutin uninominal majoritaire à un tour.

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Deuxième étape, choisir une liste

La colonne de droite est la « Zweitstimme », la deuxième voix. Ici, les électeurs votent pour une liste présentée par un parti. Il s'agit d'un scrutin proportionnel: le pourcentage de voix obtenu correspond au nombre de sièges. Il faut qu'un parti dépasse 5% au niveau national pour avoir des élus au Bundestag.

Troisième étape, répartir les sièges

Attention, ça se complique ! A l'issue du scrutin, l'ensemble des sièges est attribué en fonction du résultat obtenu par chaque parti au scrutin proportionnel, soit les croix de la colonne de droite. Par exemple, si la CDU obtient 39% des voix au scrutin proportionnel de liste, alors 233 des 598 sièges du Bundestag seront occupés par des élus du parti d’Angela Merkel (même si cela peut être plus, nous verrons cela dans un instant...). Pour attribuer ces sièges, on prend d'abord tous ceux qui ont été élus par mandat direct (Erststimme), puis on complète avec ceux qui figurent sur la liste nationale, en partant bien entendu du premier.

Le système est complexe, d'autant que si un parti remporte moins de mandats directs que ne le prévoit la proportionnelle, les députés supplémentaires seront désignés en fonction de leur place sur la liste. En revanche, si un parti remporte plus de mandats directs que ne le prévoit la proportionnelle, il conserve ces sièges. Voilà pourquoi la CDU, avec 39% des voix, peut espérer près de 260 sièges, voilà pourquoi aussi il est impossible de prévoir combien de députés exactement vont siéger après le 24 septembre. Les estimations oscillent entre 600 et 650... 

Et comme si tout cela n'était pas assez compliqué, une nouvelle règle va être appliquée pour la première fois cette année : un parti qui obtenu plus de 3 sièges lors de la « Erststimme » rejoint également le Bundestag, même s’il n’a pas les 5% requis au scrutin proportionnel national.

Quatrième, et dernière étape: l'élection du chancelier !

Une fois l'attribution des sièges réalisée, les grandes manoeuvres vont pouvoir commencer. Comme il est peu probable qu'un parti obtienne à lui seul la majorité absolue, celui arrivé en tête va entamer des négociations pour constituer une coalition avec un ou plusieurs partenaires. Cela peut prendre des semaines, car il faut que ces partis rédigent un programme commun qui va être le socle de la prochaine législature. Verra-t-on un remake de la grande coalition CDU/SPD, une alliance de la CDU avec les libéraux du FDP ? Ou avec les Verts ? Tout est ouvert, et rien ne sera décidé avant le scrutin du 24 septembre.

Une fois la coalition constituée, le chef de file du parti le plus important se présente alors au vote des députés du Bundestag pour être élu chancelier. Il va falloir être patient: en 2013, les élections avaient eu lieu le 22 septembre et Angela Merkel a été réélue chancelière le 17 décembre...

 

Par Amaury Guibert (avec Camille Despierres)