Encore quatre semaines de campagne avant le 24 septembre. Et l’issue des élections semble déjà écrite : Angela Merkel va rempiler pour un nouveau mandat de quatre ans, sans avoir dû batailler plus que ça. L'ennui est total mais c'est aussi le signe que la société allemande se porte bien.
« Pour une Allemagne dans laquelle nous vivons bien et volontiers ». Le slogan est imprimé sur certaines affiches de campagne de la CDU, avec une Angela Merkel souriante qui respire l’autosatisfaction. Le message est clair. Le même d’ailleurs que lors des précédentes élections législatives : tout va bien, ne changeons rien. Le chômage est au plus bas, l’afflux des réfugiés a été stoppé, le budget de l’État est au vert et l’Allemagne est toujours championne du monde des exportations. Et championne du monde de football aussi.
Pourtant, ce ne sont pas les thèmes de campagne qui manquent. Le scandale du diesel et un secteur automobile vital pour l’économie du pays dans l’œil du cyclone. L’explosion des bas-salaires, de la précarité et de la pauvreté chez les retraités. Sans oublier les infrastructures routières et ferroviaires en piteux état qui souffrent d’un manque chronique d’investissement. Mais la mayonnaise ne prend pas. Le candidat social-démocrate Martin Schulz a beau répéter ses attaques acerbes, elles ne rencontrent pas l’écho espéré. Pour de nombreux analystes, la faute – ou le génie, c’est selon – en revient à Angela Merkel qui évite toute polémique et affiche une posture presque de monarque de la Vème république tant elle se place au-dessus du débat politique. Difficile pour ses concurrents dans ces conditions de mettre du piment dans cette campagne.
Et après 4 ans de grande coalition entre la CDU et le SPD, il reste très compliqué pour les deux partis d’attaquer de manière frontale l’autre camp. Le bilan de l’un est forcément, un peu, le bilan de l’autre. « Cette campagne électorale est merveilleusement ennuyante » affirme, un brin provocatrice, la politologue Suzanne Schüttemeyer au site d’informations heute.de. Les réfugiés ? Le Brexit ? La politique énergétique ? Des thèmes majeurs qui n’empêchent cependant pas les Allemands de dormir balaye cette universitaire. Selon un dernier sondage, seuls 9% des Allemands ne sont pas satisfaits de leur situation économique. Aucune raison donc de tout changer. Ne dit-on pas que les gens qui s’ennuient sont des gens qui n’ont pas de problème ?
Cette absence de polarisation du débat politique se reflète également dans les scores attribués par les sondeurs aux autres partis. Le parti populiste Alternative pour l’Allemagne – AfD – plafonne en-dessous des 10%, englué dans ses disputes de courants et ses flirts avec l’extrême-droite dure. Depuis la sortie du nucléaire, les Verts n’ont plus de thème rassembleur. Quant à la gauche radicale Die Linke, elle est incapable de se renouveler et de se moderniser pour élargir son électorat. Seuls les libéraux du FDP semblent profiter du cap pris par Merkel au centre. Sans pour autant être en mesure de bousculer cette campagne. Mais Martin Schulz continue d’y croire. Dans une interview donnée aujourd’hui sur le site de la chaîne d’informations n-tv, il annonce une fin de campagne « passionnante ». Simple bravade pour faire oublier ses mauvais sondages ?
Par Julien Méchaussie