Dans un pays où le débat politique se caractérise par la courtoisie et le respect de son contradicteur, la prestation des deux finalistes de l’élection présidentielle française sidère la presse allemande ce matin. Les termes sont sans détour: « combat de boue », « un débat fou », « la bagarre, dès la première seconde »… Le Spiegel Online regrette ce débat sans fond, ces chamailleries constantes: « les deux candidats ne parlaient pas de contenu, ils cherchaient constamment à s’attaquer mutuellement ». « Quatre jours avant le 7 mai, il n’y a presque pas eu de confrontations entre les projets et les programmes ». La FAZ a vu « une agressivité sans précédent », avec « un favori qui essaye de répondre aux questions, une concurrente qui se concentre sur l’attaque », « cela a donné lieu à un vide embarrassant », conclut le quotidien de Francfort. Quand la Süddeutsche Zeitung souligne que « jamais depuis le début de la campagne, le ton n’avait été aussi agressif », le site internet de la Bild s’exclame: « Deux heure et demi d’insultes ! », avant d’enfoncer une belle porte ouverte: « une chose est sûre: ceux deux là n’iront pas boire une bière ensemble, impensable qu’ils deviennent amis pour la vie. »
Comment sont analysées les prestations des deux candidats ? Ce qui a d’abord frappé les commentateurs allemands est la violence des attaques de Marine Le Pen. Ses propos contre l’Allemagne et la chancelière ne sont pas passés inaperçus bien évidemment. Pour la Bild, « Marine Le Pen était prête dès le début à attaquer, elle incarnait la colère et la peur de ses sympathisants ». Mais pour la Süddeutsche Zeitung, « cette stratégie, provoquer Macron pour qu’il s’emporte , n’a pas vraiment fonctionné. Elle semble s’en être rendu compte elle-même: son sourire dès le début ne semblait plus vraiment convaincant. » « Marine Le Pen se démystifie », analyse le Tagesspiegel, quand la première chaîne publique, l’ARD, juge dans un éditorial que la candidate du Front National « s’est effondrée avec cette stratégie « des faits alternatifs et des attaques continuelles plutôt que des propositions constructives ».
Que restera-t-il alors ce débat ? Pour le Spiegel Online, tout cela ressemblait « à une foire d’empoigne qui a dévoilé la personnalité de deux responsables politiques plutôt que leurs visions ». Die Welt souligne de son côté la difficulté de débattre avec l’extrême-droite: « pour les populistes, ce n’est pas un échange d’arguments, mais des attaques subjectives ». Enfin, l’ARD a vu un débat certes « chaotique mais instructif ». « Non les Français n’ont pas la partie facile dans cette élection, mais après ce qui s’est passé hier soir, c’est devenu plus clair qu’avant ». Pour la FAZ, « après ce débat, Emmanuel Macron semble plus que jamais le favori de l’élection présidentielle ».
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