Courir avec une alarme et un cadenas autour de la taille, voilà ce que propose Sandra Seilz pour se protéger contre le viol. Son "safe shorts" est désormais en vente sur internet, mais certaines femmes le voient comme un "retour au Moyen-âge".
Les évènements de la nuit du Nouvel An 2016 à Cologne, pendant lesquels plusieurs centaines de femmes s'étaient faites agresser, a changé le climat en Allemagne. Les ventes d'objets d'auto-défense ont connu un boom : bracelet-alarme, bombe lacrymogène, application pour appeler la police en cas de danger… Une allemande de 41 ans, Sandra Seilz, propose une nouvelle invention : un vêtement nommé « safe short » et présenté comme une protection anti-viol.
Cette jeune femme diplômée en commerce a eu cette idée alors qu’elle faisait un jogging en forêt. Elle raconte qu’elle s’est faite aborder par trois hommes alcoolisés, et seul un homme venu promener son chien par hasard réussit à les chasser. Elle prit alors une résolution : ne jamais se retrouver dans une telle situation. Quelques jours plus tard, elle était déjà allée voir un designer, pour lui présenter son idée de produit. Le prototype a été réalisé en septembre de l'année dernière puis un site internet lancé. La première série de 150 shorts a rapidement été épuisée.
"Safe short": trois fonctionnalités anti-viol
Les avancées technologiques du textile se sont mis au service des femmes : le safe short est fabriqué dans un tissu high-tech aussi léger qu’impossible à déchirer, et même à découper avec un couteau. Cette matière est notamment utilisée pour les gilets par balle. Le vêtement est aussi équipé d'un cadenas avec un code aux nombreuses combinaisons se fermant à la taille. Le short ne peut plus être retiré sans le code secret. Troisième sécurité : l’alarme. Celle-ci se déclenche si quelqu’un essaye de baisser le short mais aussi manuellement en tirant sur un petit fil. Une sonnerie atteignant les 130 décibels résonne, de quoi alerter le voisinage. Pour les adeptes de jogging de quoi courir confortablement en toute sécurité, promet Sandra Seilz.
Voici une vidéo dans laquelle une jeune femme allemande essaye le safe shorts :
Un « retour au Moyen-âge » ?
Interviewées par une émission féministe allemande, Frau TV, plusieurs femmes expriment leur désaccord avec ce concept de protection. La présentatrice parle d’un « retour au Moyen-âge » tandis que les intervenantes mettent le safe short au même niveau que la burka : « moi en tant que femme, je devrais me tenir en sécurité, plus qu’un homme ? ». Uta Brandes, professeur de l’étude du genre à l’Ecole internationale de design de Cologne, est très énervée par cette « invention stupide », qualifiée de « technique marketing ». Pour elle, le vêtement provoque justement le contraire de ce qu'il devrait apporter : ça rend les femmes encore plus anxieuses.
Carola Klein, membre du centre de crise et de conseil contre le harcèlement sexuel des femmes, s’exaspère : « cela va tout le temps dans cette même direction : les femmes doivent faire quelque chose pour ne pas que se produise un acte d’abus sexuel. Hello ? Les femmes doivent pouvoir bouger librement ! ».
La demande est pourtant réelle car une autre initiative américaine "AR wear" s'est développée depuis 2013 proposant aussi un short non-déchirable avec un mécanisme pour ne pas pouvoir le retirer. Mais ce projet est encore au stade du prototype.
Par Sibylle Aoudjhane