Cette semaine sur France Inter et il y a un mois sur France Culture, l’académicien et philosophe persiste et signe : « La BD est un art mineur », il préfère les livres aux « illustrés ». Dans le monde du 9e art (mineur), les réactions sont vives mais j’ai peut-être la solution pour convertir Alain Finkielkraut…
La polémique débute le 5 mai dans l’émission Répliques sur France Culture. Alain Finkielkraut reproche à Louis Schweitzer, ex-pdg de Renault et premier président de la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations), de se vanter d’aimer la BD : « Pourquoi ne pas aimer la bande dessinée ? Mais s’en targuer c’est autre chose. C’est dire, en sous main, il n’y a pas d’art mineur. Et quand on dit il n’y a pas d’art mineur, non seulement on réhabilite les arts mineurs mais on vide les autres ».
Notre ami bédéphobe réitère l’exploit lundi 9 juin dans Interactiv sur France Inter interrogé par Patrick Cohen : « J’ai osé dire, vous rendez-vous compte du sacrilège, que la bande dessinée était un art mineur…quand j’étais petit, ma mère me faisait la guerre si je lisais ce qu’on appelait des illustrés, elle préférait les livres. Je préfère la peinture, je préfère les livres » et de continuer la saillie en filant au passage un petit coup au polar qui n’avait rien demandé mais qui, visiblement, ne fait pas non plus partie de ses « Livres ».
Sur les réseaux sociaux et la blogosphère, auteurs, critiques et fans de BD ont vibrionné aux annonces de l’Immortel. Fluide glacial, par l’intermédiaire de son rédacteur en chef, Yan Lindingre, a lancé sur twitter l’opération #uneBDpourFinkie. Sorte de «Finkielkrauthon» où les dons ont fait place aux conseils de lecture : chacun peut y pour proposer sa bande dessinée pour sauver le philosophe réfractaire. J’ai donc décidé d’apporter moi aussi ma pierre à l’édifice. Je pourrais suggérer un polar en bande dessinée, démultipliant ainsi l’effet Finkielkraut et passer de l’art mineur à l’ultra-mineur. Je pourrais aussi proposer Maus, Pratt, Persepolis, Tardi ou Franquin comme l’ont fait tant de lecteurs et d’auteurs. Mais non, mon choix s’est porté sur… Les blagues de Toto.
Cher Alain, vous pour qui la tradition et l’héritage ont un sens, vous ne pourrez rester insensible à l’humour si français de Toto. Je suis persuadé que petit, quand votre maman vous interdisait les illustrés, vous vous régaliez de ces histoires désopilantes que votre camarade de classe vous racontait à voix basse alors que Monsieur l’instituteur écrivait au tableau. Allez, un petit effort, vous vous souvenez ? « C’est la maîtresse qui dit à Toto : Peux-tu Toto me citer un mammifère qui n'a pas de dents ? Et Toto répond : Euh… ma grand-mère ? » Vous vous êtes, dans vos vrais livres, si souvent penchés sur le système éducatif. Mais avez-vous remarqué que l’essentiel, sinon le meilleur de Toto, tourne autour de la problématique de l’enseignement et du rapport enseignant-élève ? Encore un point de convergence entre Toto et vous.
Cette série cartonne avec plus de 2 millions d’exemplaires vendus (là, je ne suis pas certain qu’il y ait toujours convergence). Le dernier et 10e tome, ironie du sort, s’intitule l’Histoire drôle. Il est comme écrit pour vous Alain. Toto remonte le cours de l’Histoire et démonte les cours d’Histoire : Napoléon, le Moyen Âge, l’Antiquité. Et même la Préhistoire avec les hommes des cavernes qui, dans les grottes de Lascaux, pratiquaient déjà l’art mineur. Vous aimerez Les blagues de Toto, Alain, comme la BD me fait moi, vibrer, ressentir et rêver …