René Goscinny, Chris Ware ou Shigeru Mizuki, le festival mise sur les auteurs reconnus pour retrouver son public après une année blanche.
« Le festival aura bien lieu cette année, du 27 au 30 janvier 2022 » a annoncé Franck Bondoux, délégué général lors de la présentation du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême qui s’est tenue hier au Palais de la Porte-Dorée à Paris. L’année 2021 a été en effet marquée par le report puis l’annulation totale de la manifestation en raison de l’épidémie de Covid-19. On sentait le plaisir retrouvé de cette grande fête du 9e art chez Franck Bondoux comme chez les trois directeurs artistiques, Sonia Deschamps, Fausto Fasulo et Victor Macé de Lépinay qui ont conçu cette 49e édition. Avec une pointe d’incertitude car la menace sanitaire peut modifier encore son organisation. Et le doute subsiste concernant la venue d’auteurs étrangers, notamment du Japon.
Asie : le Japon à l’honneur
Une grande rétrospective sera consacrée à Shigeru Mizuki. Le mangaka, prix du meilleur album en 2007, aurait eu 100 ans l’année prochaine. L’auteur de NonNonBâ est graphiquement très riche. Même si vous n’êtes pas manga, son univers aux bestiaires fantastiques et aux fantômes terrifiants est réellement fascinant. Deux cents documents et originaux seront présentés. Autre Japonais à l’honneur, Tatsuki Fujimoto. Il n’a pas trente ans, c’est le jeune créateur débridé de Firepunch ou Chainsaw Man. Un de ses personnages culte est une sorte d’homme machine à la tête de tronçonneuse. Il travaille actuellement sur une autofiction Lookback qui connaît un gros au succès au Japon.
Chris Ware et Christophe Blain
En 2021, il n’y a pas eu de festival mais il y a eu quand même un Grand prix, Chris Ware. Et comme il est d'usage à Angoulême, le Grand prix va bénéficier d’une belle rétrospective. Auteur cérébral et fin connaisseur de l’histoire de la BD, Chris Ware est un grand nom du 9e art. Bien qu'il réside aux Etats-Unis, l’auteur de Building stories et Jimmy Corrigan serait très impliqué dans le montage de l'exposition. Pas étonnant, cet auteur est déjà venu à Angoulême et fréquente des festivals en France, il ne snobera pas cet hommage. Du côté des Français, Christophe Blain aura aussi sa rétrospective. Deux fois prix du meilleur album, il a depuis Quai d’Orsay fait exploser sa notoriété avec 540 000 albums vendus et une adaptation cinématographique. En 2019, on a retrouvé son trait sur Amertume Apache, un Blueberry avec Sfar au scénario. Cette année, il a fait le tour des médias avec sa nouveauté écolo-démonstrative, Le Monde sans fin qu’il a réalisé avec Jean-Marc Jancovici. Son trait est identifiable entre tous, autre célébrité donc attendue en janvier à Angoulême.
Goscinny assis sur un mur de 200 m2
Cette édition souhaite mettre la lumière sur le métier de scénariste BD, peu connu du grand public. Et mollement récompensé puisqu' aucun scénariste qui ne soit dessinateur n'a été honoré du titre de Grand prix par le festival. La 49e édition du festival a choisi le plus grand, René Goscinny, pour une rétrospective au Musée d’Angoulême. Elle devrait nous dévoiler le « style et la poétique » de l’auteur. Cette large exposition veut nous faire découvrir le rôle de Goscinny dans l’invention du métier de scénariste de bande dessinée. La présentation de manuscrits et de documents amènera le visiteur à entrer dans la fabrique goscinnyenne. La célébration s’achèvera par l’inauguration d’une fresque de 200 m2 représentant le scénariste assis devant sa machine à écrire. Catel, autrice d’une biographie remarquable sur le créateur d’Astérix ou d’Iznogoud, en est la créatrice.
A 98 ans, elle emmerde les fachos
Mais Goscinny n’a pas fini de faire parler de lui. Le prix René Goscinny du meilleur scénario vient d’être dévoilé en amont du festival. Il a récompensé une autrice de 98 ans, Madeleine Riffaud. Elle est coscénariste avec Jean-David Morvan de Madeleine Résistante, La Rose dégoupillée, premier tome d’une BD sur son parcours de résistante. Jean-David Morvan a recueilli son témoignage, celui d'une étonnante jeune fille de 17 ans qui, arrivant à Paris, prend les armes. « Dans tous les cas, je suis bien contente car ça va emmerder encore un peu plus les fachos (et tous leurs copains sans cerveau) qui s'amusent à écrire des slogans pro-nazis sur mon exposition au parc des Buttes-Chaumont", a réagi la lauréate, dans un communiqué diffusé par son éditeur Dupuis.