Albert Uderzo est décédé le 24 mars à l’âge de 92 ans. « J’ai assouvi mes rêves » confiait-il souvent lorsqu’il retraçait sa carrière de dessinateur. Une vie singulière qui l’a amené à créer avec René Goscinny, Astérix et Obélix, le plus énorme succès de la bande dessinée franco-belge.
1 - Uderzo avait douze doigts
Albert Uderzo est né avec des mains à six doigts. Une malformation qu’il a gardée le premier mois de sa vie, avant qu’elle ne lui soit retirée. « En réalité, ce doigt ne tenait à chaque main que par une simple membrane », explique le dessinateur dans Uderzo l'irréductible, l’excellente série d’entretiens qu’il a accordés à Numa Sadoul et publiés en recueil chez Hachette. Lui sont restées deux cicatrices aux mains auxquelles il tenait particulièrement.
2 - Il était daltonien
Ce ne sont pas le rouge et le vert qu’il confondait. Uderzo avait, en fait, plus de difficultés pour discerner les couleurs lorsque celles-ci s’assemblaient. Pourtant c’est bien lui qui a réalisé avec finesse la mise en couleurs des premiers albums d’Astérix. Le dessinateur avait trouvé des stratégies pour contourner ses troubles chromatiques. Notamment grâce à son épouse à qui il demandait de le guider dans ses choix chromatiques.
3 - Albert n’est pas son prénom
Fils d’immigrés italiens, Uderzo avait comme prénom Alberto. Il confessait avoir beaucoup souffert dans sa jeunesse du racisme. Il y était très sensible et se souvenait du « sale macaroni » qu’il fut pour certains. Il décida d’abandonner le O pour faire plus « Gaulois ». Fier de ses origines, il revendiquait le droit d’être pleinement français. Quel destin pour le rital Uderzo qui, avec son ami le juif Goscinny, a fait la plus célèbre BD sur nos ancêtres à nous tous.
4 - Falbala, la femme de sa vie
Uderzo s’est servi souvent de la caricature dans les albums d’Astérix. Kirk Douglas, Sean Connery, Bernard Blier, Lino Ventura, Guy Lux, Pierre Tchernia… et même René Goscinny ont été des personnages dessinés par Uderzo. Il en est une qui lui tenait plus à cœur. Falbala avait les traits de son épouse. Ada a été la femme de toute sa vie. Il disait avoir dessiné cette ressemblance involontairement mais avouait à Numa Sadoul que « lorsqu’il fallait dessiner une jolie pépé, elle ressemblait étrangement à Ada ! ».
5 - Clown, lettreur ou pépiniériste avant d’être dessinateur
A dix ans, Uderzo voulait être clown. Ce sont les frères Fratellini en spectacle à Clichy-sous-Bois qui ont fait naître en lui cette passion. Une vocation de courte durée. Il se destine ensuite à devenir mécanicien automobile mais à treize ans et demi, en 1940, il se retrouve lettreur et retoucheur photos dans une maison d’édition à Paris. Puis la guerre l’amène à devenir pépiniériste en Bretagne. Il travaillera aussi au côté de son père, luthier à Ménilmontant. Le métier de dessinateur commence véritablement pour lui après la guerre.
6 - Marcel Uderzo, le frère fâché d’Albert
Marcel a vécu dans l’ombre de son frère. Il est aussi dessinateur de BD. Marcel a travaillé avec Uderzo sur des albums d’Astérix. Puis ils se sont fâchés, séparés. Uderzo raconte que c’est à la suite du décès de Goscinny que son frère Marcel n’a plus souhaité travailler avec lui. Marcel reste plus vague sur les raisons de cette querelle familiale. Ils ne se sont plus parlé. Marcel continue de faire des bandes dessinées, principalement sur l’aviation, au succès bien plus modeste.
7 - Pompidou influenceur d’Astérix
Astérix a fait l’objet de nombreuses tentatives de récupérations politiques de tous bords. Gaulliste, résistante, fasciste ou gauchiste, la série a été affublée de toutes les couleurs politiques. Un comble pour Uderzo et Goscinny qui ne parlaient jamais de politique entre eux. Ils ont d’ailleurs toujours refusé l’utilisation de leurs personnages à droite comme à gauche. Mais seul peut-être Georges Pompidou aurait pu se flatter d’avoir réellement influencer les deux artistes. A l’époque président de la République, Pompidou recevait les albums d’Astérix qu’il semblait apprécier. En retour, il adressait encouragements et félicitations aux auteurs. Un jour, Pompidou, sans que les auteurs ne sachent vraiment pourquoi, incite les créateurs à imaginer une aventure d’Astérix chez les Helvètes. Une bonne idée qui sera reprise l’année suivante.
8 - Plus vendeur qu’Hergé
Uderzo, grâce au petit Gaulois moustachu, a vendu 380 millions d’albums contre 240 millions pour Tintin. Les chiffres sont vertigineux quand il s’agit d’Astérix. Des tirages à 5 millions d’exemplaires pour les nouveaux albums, 2 millions pour le seul marché francophone. Une année où un nouvel album d’Astérix sort est toujours une bonne année pour les chiffres de l’édition en bande dessinée. En revanche, côté salle des ventes, Uderzo n’égale pas encore Hergé. Le Belge reste en tête sous le marteau des commissaires-priseurs.
9 - Collectionneur de Ferrari
Sa passion pour la Scuderia remonte à ses vingt ans, en 1947. Uderzo a attendu cependant 1975 pour acheter son premier modèle. Président du club Ferrari France en 1978, il est parvenu à posséder une très belle collection avec des bolides en tirage limité et même des versions courses. Il avait aussi une impressionnante collection de Ferrari en modèles réduits. Mais ce n’était pas la seule de ses collections. Il avait consacré une pièce entière aux trains électriques. Il a eu un avion Mirage III dans sa maison de campagne. Le même qu’il avait dessiné pour la série Tanguy et Laverdure qu’il avait créée avec le scénariste Jean-Michel Charlier.
10 - Uderzo n’a jamais aimé le sanglier à la broche
Ce qu’il a fait boire et manger à ses héros de papier à longueur d’albums, il ne l’appréciait pas. Le sanglier cuit à la broche façon gauloise est une invention gastronomique des créateurs d’Astérix. Pour leur faire plaisir, des cuisiniers leur en préparaient souvent lorsqu’ils étaient invités. Mais ni Goscinny, ni Uderzo ne l’aimaient et ils qualifiaient le plat « d’immangeable ». L’hydromel non plus n’avait pas les faveurs d’Uderzo.