Le Grand Méchant Renard et autres contes…, César 2018 du meilleur film d’animation, est aussi une merveilleuse BD

Avant d’être adapté au grand écran, le César du meilleur film d’animation a été une bande dessinée de Benjamin Renner. Le Grand Méchant Renard est un récit joyeux au dessin vif, une BD qui, sans en avoir l’air, a tout du conte philosophique. Indispensable.

Décerné vendredi soir lors de la 43e cérémonie des César à Paris, le prix du meilleur film d’animation 2018 a été remis au duo de réalisateurs Patrick Imbert et Benjamin Renner pour leur long métrage Le Grand Méchant Renard et autres contes... . Benjamin Renner avait déjà été récompensé en 2013 par l’académie des César pour un autre de ses films d’animation, Ernest et Célestine. Cela ne l’a pas empêché de recevoir le prix avec émotion au moment des traditionnels remerciements sur la scène de la salle Pleyel. Une deuxième récompense mais une première BD pour Benjamin Renner.  L'auteur a réalisé, deux ans avant la sortie du long métrage, le scénario et le dessin de l’album du Grand Méchant Renard. Une jolie réussite aux éditions Delcourt dans la collection Shampooing qui a connu depuis plusieurs rééditions.

Benjamin Renner, auteur du Grand Méchant Renner (photo DR).

Benjamin Renner, auteur du Grand Méchant Renard (photo DR).

Une situation hors contrôle

Le renard est un prédateur. Mais est-ce que tous les renards le sont ? Le grand méchant renard, lui, s’y prend très mal pour assumer son rôle. Sur les conseils d’un loup viril et sûr de lui, il élabore un plan : voler des oeufs de poule pour les faire éclore et se repaître de jeunes poussins bien tendres. Ce goupil n’a pas le physique du gros costaud ni le profil du vrai méchant. Après l’éclosion, le plan dérape. Les poussins se prennent pour des renardeaux, le renard se déguise en poule, le loup veut les becqueter, les poules pourchassent le renard… La situation devient totalement hors contrôle pour ce renard qui n’a pas, au fond de lui, la volonté de devenir un méchant prédateur.

Une fable drôle et intelligente

Et c’est précisément ce que la société des animaux qui l’entoure va lui reprocher. « Sociopathe roux », lui lance une poule hystérique. « Face de pet », se moque un moineau sur sa branche. Le voleur de poules ni grand ni méchant n’est pas respecté. Même les plus faibles lui reprochent implicitement de ne pas tenir son rang. Et paradoxe comique, les poussins qui se prennent pour des renards sont, avec la certitude de leur condition, d'une cruauté sans rapport avec leur plumage. Sous le trait vif et expressif de Benjamin Renner se dessine ainsi une fable drôle et intelligente. "Si vous n’êtes pas celui que la société veut que vous soyez, gentil ou méchant, alors vous vous exposerez à des ennuis" pourrait en être la morale. Le récit fonctionne très bien avec les plus jeunes et les plus grands pour qui le deuxième niveau de lecture pousse aux rires et à la réflexion. 

Zombillénium, l'autre adaptation d'une BD

Honneur aux vainqueurs pour ces César mais honneur aussi à la BD. La compétition de cette année dans la catégorie film d’animation comportait aussi une autre belle adaptation, Zombillénium, réalisée par Arthur de Pins et Alexis Ducord. Ce long métrage est à l’origine une série de bande dessinée du même nom aux éditions Dupuis réalisée par Arthur de Pin au dessin comme au scénario. L’histoire d’un parc d’attractions où le personnel sont des morts. Sous couvert d’un récit sépulcral se cache une peinture sur la vie en entreprise dans notre belle société où le Veau d’or est l’argent. Une autre merveille.

Le Grand Mechant RenardLe Grand Méchant Renard. Benjamin Renner / Editions Delcourt. 17 €.

ZombilléniumZombillénium, 3 tomes parus. Arthur de Pins / Editions Dupuis. 14,5 €.