Le praticien, généraliste à Cherbourg-Octeville, a enfreint le Code de la santé publique. Ses propos ont été jugés contraires au respect de la vie humaine, de la personne, et de sa dignité par le Conseil de l’ordre des médecins.
Jean-François Pion, praticien généraliste à Cherbourg-Octeville, a été condamné à 6 mois de suspension d’exercice de la médecine, dont trois avec sursis. C’est la chambre disciplinaire de l’ordre des médecins de Basse-Normandie qui a rendu publique la décision le 7 juillet 2017. L’Agence Régionale de Santé de Normandie avait saisi le Conseil de l’ordre des médecins suite au témoignage d’une infirmière qui faisait part de propos choquants de la part de ce dernier.
Le docteur du Nord-Cotentin avait été appelé le 21 janvier 2017 pour se rendre au chevet d’un patient lourdement handicapé, grabataire, hospitalisé dans le centre spécialisé, "La Glacerie" à Cherbourg. C’est à l’occasion de son service que le médecin a exprimé "ses réflexions" sur le sort qui pourrait être réservé à des personnes gravement handicapées ("un bon coup de cyanure"), sur la "solution finale" des nazis à l’égard des "individus qui ne servaient à rien dans la société, les handicapés et les homosexuels", et sur l’intérêt de ne pas se laisser se reproduire les "neuneus" qui vivent "dehors". Des propos qui ont été rapportés par l’infirmière présente, Mme Hautefeuille.
Les principes de moralité et de probité non respectés
Jean-François Pion n’a jamais nié ses propos devant les juges. Il les a nuancés en affirmant que son discours était "philosophique, intellectuel, logique". Son avocat, Thomas Baudry, au moment de l’audience du 24 juin, a indiqué que "les allusions à l’extermination des handicapés ou des neuneus", selon les termes utilisés par son client, l’ont été "dans un cadre privé".
Dans sa condamnation, l’Ordre des médecins a notifié que même si la radiation du docteur Pion était impossible parce qu’il n’avait pas mis en danger la vie d’un patient et qu’il avait 20 ans de carrière irréprochable derrière lui, le médecin avait enfreint le premier alinéa du code de la santé publique, qui indique qu’"en toutes circonstances, le médecin doit respecter les principes de moralité, de probité et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine". Les propos exprimés, tenus "à l’occasion du service (…) sont contraires au respect de la vie humaine, de la personne, et de sa dignité, qu’impose au médecin l’article (…) précité", estime l’ordre des médecins de Basse-Normandie dans sa décision.
L'handicapé lourd qui a entendu les propos du médecin ou sa famille a la possibilité d’intenter une action en justice. Une action en responsabilité civile de droit commun pourrait aussi être lancée en vue de demander l'indemnisation du préjudice moral porté aux handicapés. Ce qui pourrait ouvrir un droit à réparation. Le nouvel avocat du Dr Pion, maître Jean-Pierre Levacher, n’a pas encore indiqué si son client comptait faire appel de la décision de la Chambre disciplinaire de l’ordre des médecins. Le parquet de Cherbourg est saisi.