Boxeuse. Lanceuse de javelot. Grande gueule. Ambulancière pendant la première guerre, qui s'infligera une mastectomie pour mieux tenir le volant par la suite. Bisexuelle à une époque où ça ne se faisait pas, mais alors pas du tout. Espionne de la Gestapo pendant la seconde après avoir été recrutée aux Jeux de Berlin. Sa devise : "Ce qu’un homme fait, Violette peut le faire !" Voilà le sujet (en or) de Violette Morris, à abattre par tous les moyens, la dernière BD de Kris, Bertrand Galic et Javi Rey, un trio qui avait déjà fait merveille dans l'album Un maillot pour l'Algérie.
Ça parle de quoi ?
On ne va pas maintenir de faux suspense. L'histoire commence par la découverte de six corps dans une mare d'une ferme de la campagne normande. Deux enfants, quatre adultes, dont Violette Morris, abattue un matin de printemps 1944 par les résistants, sans autre forme de procès. Lucie Blumenthal, ex-avocate, ex-camarade de couvent de Violette Morris, veut en savoir plus. Celle qui est devenue détective privée à cause de l'oukaze nazi interdisant aux Juives de porter la robe (d'avocat) se lance alors sur le traces de son amie. Remonte le fil de sa vie pour comprendre où les choses ont bien pu déraper. De son enfance chez les sœurs, à son mariage arrangé par sa famille avec un homme mobilisé pour la guerre, à ses nombreux exploits sportifs, souvent minorités par ses pairs ou par les instances.
Pourquoi on adore
Difficile de ne pas penser à la lecture de l'album à un autre destin, celui du ferrailleur Joseph Joanovici, un pied dans la résistance et l'autre dans la collaboration, magnifié dans la BD Il était une fois en France. L'histoire de Violette Morris démarre sous les mêmes auspices, l'enquête de Lucie Blumenthal (personnage fictif, mais procédé narratif qui guide à merveille le lecteur) visant à établir qui a été tué. La "hyène de la Gestapo", ou une femme trop en avance sur son époque, qui avait même perdu un procès en 1930 alors qu'elle réclamait l'autorisation du port du pantalon pour les femmes ? "Je voudrais être certaine que Violette Morris n’a pas été tuée, elle aussi, pour ce qu’elle était : une femme comme les autres hommes, homosexuelle, d’une liberté absolue et par la même scandaleuse."
C'est pour vous si...
... Vous aimez la petite histoire dans la grande Histoire, si vous aimez les biopics amenés de façon originale, et si vous avez envie de voir ce que donne une BD de Kris, ponte des récits historiques, avec une "méchante" en guise de héros, une première en une trentaine d'albums.
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Violette Morris, à abattre par tous moyens par Javi Rey, Kris et Bertrand Galic, éd. Futuropolis, 62 p. avec un dossier complémentaire fort instructif de l'historienne Marie-Jo Bonnet, environ 15 euros.