La BD de la semaine : "Gung Ho", ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort

Qu’elle est longue l’attente entre chaque tome de Gung Ho, la splendide série initiée par deux illustrateurs allemands, Thomas von Kummant (au dessin) et Benjamin von Eckartsberg (au scénario). Après Brebis galeuses en 2013 et Court-Circuit en 2015, les éditions Paquet publient Sexy Beast, le troisième volet des aventures des frères Goodwoody, deux orphelins placés dans un camp retranché alors que l’Europe vit sous la menace d’un mystérieux prédateur.

Ça parle de quoi ?

Débarqués de la ville et de l’orphelinat qui les avait recueillis, Archer et Zach sont placés en famille d’accueil à Fort Apache, une des colonies situées au beau milieu de la zone de danger, autrement dit en milieu hostile. Car, si les deux frangins ont des looks d’ados de maintenant, on comprend vite que le monde dans lequel ils évoluent est sensiblement différent du nôtre. Pour une raison que l’on ignore, les humains sont désormais les proies d’un dangereux ennemi qui nécessite de vivre en vase clos, dans des sortes de villages fortifiés.

Pas encore des adultes et plus vraiment des enfants, les deux gamins vont devoir se plier à certaines règles pour optimiser leurs chances de survie. Mais l’obéissance et la discipline ne sont pas compatibles avec nos deux frangins. Archer, l’aîné branleur et séducteur, et Zach, le jeune intrépide, ont bien du mal à trouver leurs marques dans ce monde aussi inhospitalier qu'excitant pour ces deux têtes brûlées.

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Pourquoi on adore ?

Il suffit juste de feuilleter Gung Ho pour être frappé par son style graphique unique. Plus proche d’une peinture que d’une bande dessinée, Gung Ho est le fruit du travail de deux illustrateurs, et ça se voit. Repérés en France et en Allemagne grâce au succès de La Chronique des Immortels, leur adaptation des best-sellers de fantasy de Wolfgang Hohlbein, les deux compères ont finalement décidé de se lancer en proposant aux éditions Paquet de publier une histoire originale.

"Je voulais développer quelque chose de nouveau pour le marché français, mais les artistes français sont très doués avec les traits donc je ne vois pas l’intérêt de faire mieux. J’ai donc décidé de travailler sans trait" explique Thomas von Kummant à Kaboom. Entièrement réalisées sur ordinateur avec une technique de calques façon collage afin d’améliorer la lisibilité, les planches de Gung Ho sont une vraie innovation dans la bande dessinée.

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Avec ses lumières sublimes et ses couleurs éclatantes, Gung Ho rompt avec les codes traditionnellement utilisés quand on dépeint un monde post-apocalyptique. A Fort Apache, il fait beau, les ados pavanent en maillot de bain au soleil et bravent le danger pour aller se baigner dans le lac.

D’ailleurs, cet univers où la mort peut survenir à chaque instant n’est qu’un prétexte à la véritable histoire. En fait, Gung Ho (en référence au cri que des Marines poussaient lors de la seconde guerre mondiale pour se donner du courage) traite de l’adolescence et des conflits générationnels. Comment se construire en respectant ses aînés alors que certains d'entre eux se comportent comme des ordures ? Dans ce monde où les adultes ont oublié de vivre et ne cherchent plus qu'à survivre, où un gestionnaire corrompu abuse des jeunes filles en échange de substances illicites, c’est la jeunesse qui va tenter de changer les choses, en bravant les règles établies.

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C’est pour vous si...

Vous trouvez que la série The Walking Dead est partie en sucette depuis longtemps, vous en avez ras la casquette des zombies et la sortie du dernier volet de La Planète des singes : Suprématie vous semble trop loin (le 2 août prochain), Gung Ho est une alternative parfaite avec sa menace qui rôde, ses humains paumés et la survie comme leitmotiv quotidien. Débutée en 2013, la série doit compter cinq tomes. Mais, même si son scénariste assure avoir déjà tout écrit, il faudra probablement attendre 2021 pour connaître son dénouement. On n'a pas fini de trépigner.

Gung Ho, tome 3 : Sexy Beast de Thomas von Kummant (dessin) et Benjamin von Eckartsberg (scénario), éd. Paquet, 80 p. environ 17 euros.