Amoureux des massacres de zombies dans The Walking Dead et autres effusions d’hémoglobine chez Tarantino, réjouissez-vous : Preacher, le comic culte ultra violent de Garth Ennis va renaître à la télévision. Quinze années après l’arrêt de sa parution, ponctuées de multiples projets d'adaptation morts-nés, Pop Up’ vous dit tout sur ce monument controversé de la bande dessinée américaine.
Difficile de résumer Preacher tant le comic des Britanniques Garth Ennis (scénario) et Steve Dillon (dessin) est un catalogue de pop culture. Mêlant cowboys, vampires, anges et autres démons, Preacher est surtout une BD qui ne s’interdit rien. Consanguinité, torture, zoophilie, aucun tabou n’échappe au cerveau malade de son prolifique scénariste à qui l'on doit également Hitman et Hellblazer.
Tentons tout de même de situer cette extravagante histoire. Preacher suit les aventures du révérend Jesse Custer, pasteur malgré lui dans une petite bourgade du Texas. Après avoir fusionné mentalement avec Genesis, progéniture d’un ange et d’un démon, Custer part à la recherche de Dieu qui vient de démissionner du paradis. Dans sa quête, il est aidé par son ex-copine Tulip, devenue récemment tueuse à gage, par Cassidy, un vampire alcoolique d’origine irlandaise et par le fantôme de John Wayne. Difficile d'imaginer un scénario plus dingo.
Récompensé aux Oscars de la BD
Embarquée dans un road-movie sanguinolent, cette équipe de choc croise une galerie de personnages tous aussi détonnants comme le délicieux Tête de Fion, un ado défiguré après s’être fait sauter la cervelle en hommage à Kurt Cobain ou encore Le Saint des Tueurs, un cowboy invincible. En prophète du mauvais goût, Ennis met le paquet pour choquer son lecteur. Tellement que son comic finit par devenir un bijou d’humour noir à faire passer Tarantino pour une fillette. Exagérément outrancier mais auréolé d’un Eisner Award du meilleur scénariste (l’équivalent des oscars de la BD), Preacher est le comics qu’il faut absolument lire.
Ca tombe bien, les éditions Urban Comics ont entrepris de ressortir son anthologie sous la forme de six épais recueils, chacun rassemblant une douzaine d’albums parus entre 1990 et 1995. Six mois après la parution d'un premier volume, un second débarque en librairies le vendredi 21 août. A ce rythme, tout devrait être réédité avant la sortie de l’adaptation télévisée qui vient enfin de démarrer.
Un comic "trop violent et trop controversé" selon HBO
Car ils sont nombreux à s’être cassé les dents à tenter d’adapter Preacher à l’écran. D’abord en tentant de faire de ces 66 albums complètement fous un film de deux heures. Kevin Smith (Clerks, Scream 3) puis Sam Mendes (Spectre, American Beauty) avaient été approchés pour le réaliser. Sans succès. Plus étonnant, le refus essuyé en 2008 par le réalisateur Mark Steven Johnson (Daredevil) de la part de HBO. La chaîne câblée américaine avait jugé Preacher "trop violent et trop controversé" et avait préféré décliner le projet d'une série télévisée. Les détracteurs de Game of Thrones (série diffusée sur HBO) qui trouvent la série trop violente peuvent donc retourner faire du macramé, la poursuite de la lecture de cet article s’avérant parfaitement inutile.
Sept années de travail pour adapter "Preacher"
En février 2014, c’est finalement AMC (The Walking Dead, Mad Men, Breaking Bad) qui se lance. Sous l’impulsion de l’acteur et réalisateur Seth Rogen et de son acolyte Evan Goldberg (The Interview, SuperGrave), tous deux fans absolu du comic, un pilote de Preacher est vendu à la chaîne câblée américaine après sept années de labeur.
I can't believe we are fucking doing this!!!! #Preacher pic.twitter.com/PR0LjZD8wh — Seth Rogen (@Sethrogen) 13 Mai 2015
Ecrit par le showrunner Sam Catlin, une des têtes pensantes de Breaking Bad, le pilote de Preacher en cours de tournage devrait être montré aux dirigeants d’AMC en 2016. Reste à savoir s’il sera retenu pour une saison entière.
Une série inspirée de la BD
D’ici là, les fans retiennent leur souffle et guettent le moindre indice filtrant sur cette adaptation. On sait d’ores et déjà qu’elle ne sera pas totalement fidèle à la bande dessinée. Comme pour The Walking Dead, il s’agira plutôt d’une série inspirée par le comic dans laquelle on retrouvera les personnages principaux. D’ailleurs, la série ne se déroulera pas dans les années 90 mais de nos jours.
#Preacher pic.twitter.com/OlKTKVlfhj — Seth Rogen (@Sethrogen) 22 Mai 2015
Selon What Culture, c’est le pertinent "Son of a Preacher Man" de Dusty Springfield (déjà présent dans la bande-originale de Pulp Fiction) qui a été choisi pour la musique du générique de ce western fantasy.
Côté casting, c'est un abonné des seconds rôles, Dominic Cooper (Captain America: First Avenger) qui incarnera le charismatique révérend Jesse Custer. Plus surprenant, le choix d’une actrice noire, Ruth Negga (Marvel : Les Agents du SHIELD) pour incarner Tulip, initialement blonde dans le comics. Enfin, Joseph Gilgun (Misfits) incarnera Cassidy. Bonne nouvelle, Tête de Fion sera également du casting (incarné par le jeune Ian Colletti). D’autres personnages secondaires ont déjà été imaginés et on retrouvera avec grand plaisir Elizabeth Perkins, disparu des radars depuis la fin de Weeds.
Les quelques chanceux qui ont eu l'occasion de lire le script ont été séduits. De leurs côtés, Rogen et Goldberg ont déclaré : "Preacher est notre comic préféré depuis la première parution. Garth Ennis, une de nos idoles. Et c'est un incroyable honneur de travailler sur cette adaptation. Nous promettons de ne pas trop faire de blagues salaces pour ne pas ruiner le comic", mais le mystère demeure quant aux concessions que devront faire les deux auteurs.
Quid des scènes et dialogues trop violents ou vulgaires qui ne pourront jamais passer à la télévision ? Privé de ce qui est sa substantifique moelle, une débauche de bestialité et de blasphème montrée et jamais suggérée, que restera-t-il de Preacher ? En attendant de le découvrir, régalez-vous avec la bande dessinée. Vous comprendrez mieux le dilemme que pose une telle adaptation...
Preacher – Livre 2, disponible le 21 août dans la collection Vertigo Essentiels chez Urban Comics. Il comprend les chapitres 13 à 26 - 424 pages, 28 euros.
