Il aura fallu près d’un an pour que cette mini-série britannique traverse enfin la Manche. Diffusée à l’été 2014 sur BBC Two, au Royaume-Uni, et SundanceTV, aux Etats-Unis, The Honourable Woman débarque enfin en France, sur Canal+, le lundi 29 juin. L’occasion de découvrir ce thriller d’espionnage politique qui a valu à Maggie Gyllenhaal le Golden Globe 2015 de la meilleure actrice dans une mini-série. Qualifiée dès sa sortie de Homeland britannique, The Honourable Woman a pourtant plus d’atouts que sa grande sœur américaine. Si la performance époustouflante de la sœur de Jake peut suffire à convaincre de regarder les neuf épisodes, la série offre d’autres atouts non négligeables.
Elle est plus complexe et subtile
Enfants, Nessa Stein (Maggie Gyllenhaal) et son frère Ephra (Andrew Buchan) assistent à l’assassinat de leur père, un marchand d’armes sioniste. Vingt-neuf ans plus tard, la jeune femme fraichement nommée à la Chambre des Lords, s’est muée en respectable femme d’affaires israélo-britannique. A la tête de la société paternelle, elle œuvre pour la réconciliation entre Israël et la Palestine en transformant le groupe Stein en entreprise de télécommunication. Mais sa philanthropie se heurte à des intérêts économiques et politiques qui la dépassent. Et derrière son regard triste et doux, Nessa Stein n’est peut-être pas la "femme honorable" qu’elle laisse transparaître.
Dès le pilote, la violence des meurtres et les flashbacks au Moyen-Orient font écho à la série Homeland. The Honourable Woman baigne ainsi dans une atmosphère qui suinte la suspicion, a comme fil rouge des enlèvements (Nessa Stein a été kidnappée à Gaza huit ans plus tôt) et met à l’honneur les manigances des services secrets.
Mais rapidement, The Honourable Woman se révèle plus complexe que Homeland. “Qui croire ? Comment savoir ? […] Nous avons tous des secrets. Mais parfois… Des choses arrivent, qui ne laissent pas d’autres choix que de les révéler, de laisser voir au monde qui on est réellement. Mais la plupart du temps, on ment”, répète comme un mantra la voix-off de Nessa Stein au début de chaque épisode. Dans Homeland, l’enjeu était de savoir si Brodie était un héros ou un traître. Dans The Honourable Woman, tous les personnages ont une part de mystère. On ne sait jamais où situer le curseur entre bon et mauvais et il y a beaucoup trop de zones d’ombres pour trancher, comme l’explique The Week (en anglais).
La densité et la complexité de The Honourable Woman s’expliquent également par son format. Alors qu’une cinquième saison de Homeland est en préparation - malgré la mort de son principal héros dans la saison 3 - The Honourable Woman ne compte que huit épisodes d’1 heure (neuf de 52 minutes dans la version diffusée sur Canal+). Un format court qui impose un rythme effréné à la série. Mieux, son scénariste et réalisateur Hugo Blick (The Shadow Line) a confirmé qu’il n’y n’aura pas de saison 2. Une décision radicale mais nécessaire.
Maggie Gyllenhaal 1-0 Claire Danes
Avouons-le d’emblée, on déteste Claire Danes dans Homeland. Autant l’actrice était touchante en ado romantique dans My so-called life (Angela, 15 ans en VF), autant son jeu grimaçant est insupportable dans Homeland. Devenue l’héroïne officielle de la quatrième saison (après la mort du co-héros, donc), elle inflige au spectateur ses mimiques de bipolaire, alternant visage convulsé par les larmes et délires paranoïaques. Une prestation identique au fil des saisons qui lui a permis de remporter le Golden Globes de la meilleure actrice en 2013. Un vrai mystère.
Là où Claire Danes est, à elle seule, un argument dissuasif au visionnage de Homeland, Maggie Gyllenhaal irradie The Honourable Woman. D’ailleurs, si le réalisateur a choisi une Américaine pour incarner une femme d'affaires britannique, c’est probablement qu’il l’a trouvée bluffante. Naturellement charismatique, elle passe avec aisance de la business woman inflexible à la jeune femme fragile abimée par le passé.
Elle est moins machiste
Nessa Stein est une femme forte, qui dirige l’entreprise de son père tandis que son frère aîné Ephra reste dans l’ombre. Un personnage à l’opposé de l’agent spécial Carrie Mathison, sans cesse décrédibilisée par sa maladie dans Homeland.
Dans The Honourable Woman, les femmes sont certes honorables, mais elles ont surtout de la poigne. "De l’espion de terrain au ministre des Affaires étrangères, de l’agent double au chef des services secrets, toutes les pièces de l’échiquier sont des femmes”, rappelle le blog A Suivre. Et que dire d’Atika Halibi, la mystérieuse baby-sitter enlevée avec Nessa Stein à Gaza avec laquelle elle partage un lourd secret ? Son personnage est sûrement le plus ambigu de la série et il faudra attendre les derniers épisodes pour découvrir son véritable rôle au milieu de ce passionnant thriller d’espionnage.
Interviewé par le New York Post, Hugo Blick résume avec humour sa série : “C’est comme la Coupe du monde de football, on a onze joueurs qui sont tous des femmes. Et le gardien de but est Stephen Rea [l'acteur qui incarne le directeur du service Moyen-Orient du MI6]”. Mais à la fin, on ne sait pas vraiment qui gagne...
Les trois premiers épisodes de The Honourable Woman sont diffusés sur Canal+, le lundi 29 juin, à partir de 20h55.