Avec le comics "Northlanders", vous ne verrez plus les Vikings comme avant

Vous avez découvert les Vikings en BD avec Astérix. Ils sont tous blonds, portent des noms en "-af", boivent du calva dans le crâne de leurs ennemis et ne connaissent pas la peur. Vos pérégrinations bédéphiles vous ont emmené sur les traces de Thorgal, autre approche des hommes du Nord, entre sorcellerie et Heroic Fantasy. La série Northlanders, déclinée en trois (gros) volumes en français, offre un kaléidoscope de l'histoire des Vikings de 700 à l'an mille avec des histoires variant de 16 à 200 pages. Cette série mérite le détour à plus d'un titre, et pas seulement parce que c'est l'un des rares comics historiques potable.

Le scénariste, Brian Wood, a potassé son histoire viking, et l'éditeur français a ajouté une préface de l'historien Patrick Weber en caution supplémentaire. On découvre beaucoup de choses surprenantes sur la société viking : la place des femmes, qui se comportent en chefs d'entreprise pendant que leurs maris partent piller quelques monastères anglais sur leurs drakkars, l'acculturation progressive menée par les chrétiens pour conquérir les âmes de cette terre rebelle - et leur habileté politique pour diviser les Vikings, qui fonctionnaient dans un modèle cousin de la démocratie athénienne - ou encore la colonisation de l'Islande, île aride devenue planche de salut pour les Normands chassés de leur terre.

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Brian Wood ne livre pas un cours d'histoire, mais une chronique qui dépeint, par petites touches, la civilisation viking, loin des clichés. Il se permet des libertés avec l'Histoire quand cela est nécessaire : ainsi, dans le récit principal du Livre anglo-saxon, le guerrier Sven, de retour sur sa terre natale pour chasser son père du pouvoir, affirme avoir fait partie de la garde varègue, l'unité d'élite qui protège le roi de Constantinople à partir de 988. Or, l'histoire est datée de 980, relève Good Comics.

Les amoureux du pinaillage iront lire les commentaires de la fiche de l'album sur Goodreads (des centaines de pages de débat), les autres ne bouderont pas leur plaisir devant une série remarquable, tant sur le plan scénaristique que graphique. Plusieurs dessinateurs se succèdent sur la série, chacun apportant son univers au monde brumeux des Vikings. On n'aimera pas tout de la même façon, mais on ne restera pas de marbre devant leurs efforts. Mention spéciale à Davide Gianfelice, qui signe des couvertures magnifiques, toutes reprises dans l'album (ici, ici, et ici) et l'histoire de Sven le Revenant (ainsi que sa suite en Islande, mais chuuut, pas de spoiler).

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Pour l'édition française, la série a été organisée en trois livres, chacun se concentrant sur une zone géographique (le Royaume-Uni, l'Islande et l'Europe), avec les histoires remises dans l'ordre chronologique. Une modification bienvenue (avec la bénédiction de Brian Wood). La série a été arrêtée par l'éditeur américain DC Comics après 50 épisodes, tous rassemblés dans les trois volumes disponibles. C'est vraiment dommage : une fois la lecture finie (1 100 pages tout de même), on en redemande.

Northlanders, livres anglo-saxon, islandais et européens, Urban Comics, 28 euros.