Patois or not patois ?

Il m'a fallu ouvrir le Larousse pour aller vérifier qu'une musette était bel et bien un sac et pas seulement un instrument à vent ni même un bal. C'est mon côté provincial qui parfois avance des phrases mâtinées de régionalismes et qui préfère vérifier les choses à deux fois quand le doute l'assaille : Patois or not patois ? C'est sans doute que le mot "musette", je ne l'ai entendu employé que dans un contexte lexical familial rural, et dans un temps de la journée bien particulier et toujours le même, le soir, à l'heure où les enfants dorment. C'est peut-être aussi parce qu'il était l'heure de dormir que j'ai vissé dans ma petite tête d'enfant une extension de sens toute personnelle au mot musette, laquelle extension en est pour toujours devenue le sens premier. Pour moi la musette n'est pas un sac, c'est le pique-nique préparé le soir pour le lendemain et glissé dans un sac.

Le repas emporté

Ma grand-mère ne s'est jamais couchée de bonne heure et a longtemps "préparé la musette" après le film. Elle cuisinait une omelette ou découpait un bout de viande restant d'un repas précédent, tranchait de larges morceaux de pain et de fromage, tirait du vin dans des bouteilles en verre et tapait sur les bouchons de liège pour éviter les fuites, elle ajoutait un fruit ou des gâteaux secs, puis déroulait de grandes feuilles d'aluminium, enveloppait ses préparatifs là-dedans (je ne crois pas qu'elle ait jamais vu de tupperware de sa vie), mettait l'ensemble dans un torchon et le torchon dans la musette qu'emporteraient les hommes de la maison travaillant au grand air, loin des zones urbaines, des restaurants ou des épiceries.

La petite madeleine

Tout le monde aura compris que depuis Amsterdam c'est la dèche, la vraie bonne dèche, et que wesh, on n'est que le 23. Dans ce cas-là, aux grands maux les grands remèdes : décaler tous les déjeuners professionnels au mois suivant et préparer la musette après le film parce que ma carte de cantine est à sec. Il fallait bien que je vous explique le pourquoi du comment de la musette. Et que cette musette, en vérité, elle me ravit l'esprit ! Je pense aux gestes mille fois observés, enfant, à ma grand-mère et aux hommes de la maison, je réalise que je prépare consciencieusement pour ma fille une musette depuis qu'elle est scolarisée sans jamais l'avoir oubliée (le goûter), je pense au bentō préparé avec amour par les mères japonaises à leurs enfants et qui est une musette stylisée. Et voilà que je me prépare une musette-dèche presque joyeusement, dis donc!