Peut on décorer de la légion d’honneur le prince héritier d’un régime qui exécute ses opposants, bafoue la liberté de la presse et soumet les droits des femmes au bon vouloir des hommes ? La réponse est oui, François Hollande a remis vendredi 4 mars la Légion d'honneur au prince saoudien Mohamed ben Nayef et on ne peut pas vraiment dire que l’Elysée ait beaucoup communiqué sur le sujet. Dans l’agenda de la présidence, le rendez vous présidentiel tenait en une ligne.
Quels autres dignitaires étrangers la France a-t-elle honoré de sa plus haute distinction ? La Grande chancellerie de la légion d’honneur nous a répondu qu'il était impossible de nous transmettre la liste. La commission d'accès aux documents administratifs oppose de son côté la raison d'Etat : "la communication de tels décrets porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France”.
Bachar Al Assad, Ali Bongo, Mussolini...
Quels sont donc les noms de décorés étrangers qu‘il faudrait taire pour ne pas mettre en péril la diplomatie française ? Un seul homme en France peut nous répondre : Michel Wattel. L’ancien rédacteur en chef du Who’s who en a dressé la liste dans son livre, "Les grand' croix de la Légion d'honneur", Editions Archives et Culture. Voilà le résultat : Nicolae Ceaucescu, Benito Mussolini, Bachar Al-Assad, Vladimir Poutine et Ali Bongo font partie de ceux qui ont reçu la plus haute distinction française.
Il y a donc la médaille, et le revers de la médaille, car ça marche dans les deux sens. Nos présidents, eux aussi, sont parfois décorés par des pays pas franchement démocratiques. François Hollande a par exemple reçu le premier grade de l’ordre dostyk du Kazakhstan, et le collier de l’ordre du roi de l’Arabie Saoudite, affaire de réciprocité.