Le Petit Larousse 2015 compte une floppée de nouveaux mots dont ... "noniste" (nom et adjectif). A la page 789 du dictionnaire, le lecteur découvrira la définition suivante :
Inutile de compter sur ses doigts : il a fallu dix ans ou presque pour que le terme soit imprimé sur les petites pages blanches . En France, c'est en 2005 qu'il avait connu son apogée lors de la campagne référendaire sur le traité constitutionnel européen.
On s'en souvient, le "non" l'avait emporté avec quasiment 55% des voix , et avait résonné avec force puisque le taux de participation frôlait les 70% (à comparer aux 60% d'abstention annoncés par les sondages pour dimanche).
De ce refus, il n'a pas été tenu compte : l'essentiel de la Constitution a été repris dans le Traité de Lisbonne sans être soumis au suffrage populaire (le texte a été ratifié par le Parlement français en février 2008, sous la présidence Sarkozy).
Ce "déni démocratique", pour reprendre l'expression de Coralie Delaume (auteure d'Europe , les Etats désunis), a probablement contribué à la désaffection des Français vis-à-vis des scrutins européens (celui de 2009 enregistrait déjà un record de 59,5% d'abstention, souligné par Le Figaro).
"Un "noniste" a été défini comme partisan du non"
Mais pourquoi a-t-il fallu (quasiment) dix ans à Larousse pour prendre en compte l'appellation "noniste" qu'on croyait - à tort- morte et enterrée ?
"Nous n’avons pas fait entrer « noniste » au moment du référendum pour la Constitution européenne, précise la directrice du département Dictionnaires et Encyclopédies des éditions Larousse, Carine Girac-Marinier, car le mot avait alors toutes les chances de n’être qu’un effet 'de mode' lié à cette actualité. On avait peur qu'il ne soit plus utilisé ensuite.'
"Or, poursuit-elle, ça ne s'est pas passé comme ça.. Le mot a fait son petit chemin dans la société. Un "noniste" a été défini comme partisan du non, pas forcément par rapport au référendum." Larousse a "choisi de faire entrer ce terme cette année" après avoir constaté "que son usage était désormais bien attesté dans le contexte plus général de toute élection portant sur l’Europe, mais aussi, plus largement encore, lors de tout référendum effectué dans la francophonie, et notamment au Québec".
Elle signale aussi que "la moitié des attestations de l’utilisation du mot datent d’après 2005, preuve que ce mot s’est implanté une fois l’actualité retombée."
Deux ans avant les éditions Larousse, l'écrivain et journaliste Etienne de Montety s'était d'ailleurs emparé du terme "noniste", dont il donnait la définition suivante : "Parlementaire désigné par son non. Ce néologisme désigne les partisans du non au traité budgétaire européen".
Constitution, traité budgétaire, pacte transatlantique ... à quand le test : "quel noniste êtes-vous ?" Gageons toutefois qu'après une campagne hantée par le spectre du "non", on se réinterrogera, dimanche, sur ceux qui ont popularisé le vocable en 2005.