Dimanche 9 novembre, la Catalogne a organisé un référendum pour son indépendance. Un succès en terme de nombres de participants mais un acte politique qui comptait pour du beurre. Mascarade, coup de force, sondage grandeur nature, expression populaire d'un désir légitime, chacun jugera.
C'est une très vieille histoire en tout cas : dès 1640, les Catalans défiaient déjà l'état central espagnol avec la révolte dite des faucheurs ("Els Segadors" en catalan) qui inspira une chanson populaire au XIXe siècle, devenue l'hymne officiel de la Catalogne. Le voici dans une version interprétée par La Capella Reial, ensemble vocal fondé par Montserrat Figueras et Jordi Savall, deux figures majeures de la musique catalane et personnellement très engagées pour l'indépendance de la Catalogne.
Car oui, la Catalogne a un hymne officiel depuis 1993. Pour la peine, ils ont déjà presque tout. Il faut dire qu'agitant la menace d'indépendance, la Catalogne a obtenu trois statuts successifs, lui donnant chaque fois un peu plus d'autonomie. Il y a donc un parlement, un gouvernement autonome (la Généralité de Catalogne) avec un président à sa tête. La santé, l’éducation et les services sociaux relèvent par exemple de ses prérogatives. Il y a une langue catalane ayant la primauté d'usage dans la vie courante, dans le système éducatif, dans les administrations. Des journaux, des télévisions exclusivement en catalan. Vous n'êtes plus vraiment en Espagne, vous êtes déjà en Catalogne. De quoi rendre jaloux même des écossais qui sont encore très loin d'avoir une telle autonomie.
A se demander pourquoi les Catalans veulent à tout prix leur indépendance, si ce n'est exprimer une blessure d'orgueil depuis que la reconnaissance officielle de la nation catalane leur a été refusée en 2010. Si ce n'est lâcher les régions plus pauvres de l'Espagne dans une vision individualiste et cynique. La culture a parfois bon dos...
Pourquoi ce "toujours plus" alors que justement le bien-nommé président de la Généralité de Catalogne s'appelle Artur... Mas ("plus" en français) ? Biberonnés depuis 350 ans au fantasme latent de l'indépendance et abusant d'un sentiment victimaire, les Catalans en veulent toujours plus et les politiciens suivent, que ce soit par conviction ou par ambition. On pourrait leur rétorquer déjà que Franco est mort depuis1975. Et que si la Catalogne a subi de plein fouet le joug de la dictature, ils n'ont pas eu le monopole et de la souffrance et de la culture opprimée. Et leur demander enfin si tout ça représente bien une raison suffisante pour jouer les divas outragées et risquer de plonger l'Espagne, et avec elle toute l'Union Européenne, dans un flou chaotique ?