Et les enfants ?

Chaque jour nous recevons beaucoup de messages sur l'adresse contact.
Ce matin nous décidons de publier celui de Marion qui traite de la question de la parentalité vécue comme une pression sociale.
N'hésitez pas à nous écrire, nous aimons les critiques comme les bons mots !

Bonjour,

il y a des tas de questions qui me laissent sans réponse dans votre questionnaire. Principalement celles faisant référence aux enfants et à la famille.
Pour vous, c'est sûr. Soit on mène une vie avec enfant, soit on mène une vie sans enfant. Et on sait déjà comment ça se passera.
Mais très franchement, qui, à 24 ans ou moins, peut annoncer avec certitude des choix de vie aussi importants que ceux-là ? Alors qu'on ne sait nous-mêmes pas toujours de quoi sera fait notre demain.
Moi je vous réponds que je ne sais pas.
Ado, j'ai toujours considéré que oui, j'aurai des enfants parce que c'est normal d'en avoir. Aujourd'hui, je ne sais pas. Et je n'ai pas envie de savoir. Parce que temps que je ne ressens pas l'envie viscérale d'avoir des enfants, c'est que je n'en veux peut être pas. Passionné d'équitation, j'ai toujours eu l'envie viscérale d'avoir un cheval. Et pour ce faire, il me faut attendre d'avoir les moyens de l'entretenir. Pourtant, c'est un désir qui m'habite tous les jours. Le jour où je désirerai avoir un enfant aussi ardemment que je désire avoir un cheval, alors oui, ce jour-là, il faudra que je pense sérieusement à en faire un... Et je pense qu'il n'y a que dans ces situations que nous devrions envisager de procréer. L'acte de donner la vie n'est peut-être pas suffisamment réfléchi. Peut-être qu'on fait des enfants uniquement parce que c'est dans l'ordre des choses.


Mais entre nous, la véritable question que vous devriez poser est la suivante : désirons-nous PERSONNELLEMENT des enfants ? Et surtout, pourquoi ? D'où nous vient ce désir ? Si, petite, je n'envisageais pas ma vie sans enfant, n'est-ce pas parce que la société dans laquelle j'ai grandi m'a toujours fait penser qu'une vie ne pouvait pas être bonne sans enfant. Qu'il était impossible d'être heureux sans enfant et qu'il est normal d'en désirer et d'en faire alors qu'il est anormal de ne pas en vouloir.
Aujourd'hui, je ne sais pas si je veux des enfants. Je crois surtout que je suis victime d'un système qui exerce consciemment ou non des pressions sociales et qui considère comme acquis le fait d'avoir des enfants. Personne ne semble pouvoir envisager sa vie sans enfants. Ou alors, il ne sera pas heureux. Ces pressions sociales s'exercent aussi bien sur les hommes que sur les femmes, et ce, même si je pense que les femmes subissent plus que les hommes à ce niveau-là.

Mes parents me demandent quand deviendront-ils grands-parents ? Mes amis avec des enfants me demandent si je compte m'y mettre un jour ? Enfant, on m'a mis des poupées dans les mains et les publicités sont pour la plupart concentrées autour d'une famille. Et encore... J'ai le temps. Mais qu'en sera-t-il si à 40 ans je ne sais toujours pas ? L'horloge biologique se chargera de me mettre la pression. Mais elle ne sera pas seule. La famille, les amis, la société tout entière me criera de me bouger le cul, parce qu'après il sera trop tard. Et alors ? Ferai-je un enfant sans vraiment le vouloir pour éviter qu'il ne soit un jour trop tard ? Ferai-je un enfant pour éviter d'avoir des regrets, mais au risque d'avoir des remords ? Tout le monde s'accordera pour dire qu'une décision prise dans ces circonstances ne peut pas être bonne. Tout le monde, sauf quand il s'agit de pondre...
Pourtant, aujourd'hui, nous pouvons faire le choix d'une vie sans enfants. Nous avons cette possibilité. Pourquoi, alors que tout le monde s'acharne à dire que nous sommes trop nombreux sur Terre, cette possibilité n'est-elle jamais évoquée ?

Marion Fernandez