Primaire de la gauche : les grands enseignements en matière de communication

Quels grands enseignements pouvons-nous tirer de ce premier tour de la primaire de la gauche ? La réponse en 5 points.

1Si le vote se cristallise les tous derniers jours de campagne, le programme s’établit de longs mois avant

Alors que fin décembre Manuel Valls était donné favori de la primaire par l'ensemble des sondages, la donne s’est inversée quelques jours avant la fin du vote. Désormais, non seulement l’électorat est volatil mais il est également insondable. D’où l’importance des apparitions médiatiques avant le sprint final. D’où la nécessité aussi de préparer bien en amont un programme avant de se lancer dans la bataille. Ce fut le cas de Benoît Hamon, comme de François Fillon. Pourquoi ? Pour tester les arguments et affûter ses flèches avant de les décocher. Notamment sur les réseaux sociaux. L’un des canaux privilégiés de Benoît Hamon qui a su séduire un public jeune et connecté.

2Tout ce qui semble nouveau, transgressif, hors système l’emporte à nouveau

Et même si certains candidats n’ont absolument rien de neuf, transgressif et anti-système... C’est bien là le paradoxe. Mais voilà, Benoît Hamon n’avait pas participé à la primaire de 2011, contrairement à Manuel Valls ou bien encore Arnaud Montebourg qui avait ferraillé lors de l’édition précédente. Les Français aspirent à du renouveau et peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse. A ceci près que Benoît Hamon, que l’on soit pour ou contre son programme, a fait l’effort certain de proposer de nouvelles idées en cohérence avec sa posture et c’est cette forme de sincérité qui a été récompensée : le discours est toujours plus incarné quand il s’agit de débattre sur le fond. Il a su s’imposer comme une nouvelle voix de gauche, là où un Montebourg a rejoué le match de 2011 et va devoir s’interroger ses attributs d'image auprès de l'opinion. Quant à Manuel Valls, il paie ses tergiversations résumées en un seul slogan : « 49.3 on n’oublie pas ». Redoutable de précision et d’efficacité.

3L’Elysée boude la primaire et ça se voit

Déplacement au Chili puis en Colombie pour François Hollande. Il nous aurait dit qu’il avait aqua-poney, que l’effet serait le même. En termes de communication, tout ceci ne correspond en rien à un message subliminal : c’est un message explicite adressé aux candidats. Quant au compte Twitter de l’Elysée, bien évidemment, il s’adresse à tous les Français et doit respecter une certaine forme de neutralité. Mais je vous laisse apprécier, notamment, ce tweet sur l’électricité photovoltaïque qui a bien fait rire les internautes.

 

4Benoît Hamon ne sait pas qu’il faut toujours prendre la parole en dernier

En intervenant avant Manuel Valls, il l’a laissé conclure et l’attaquer très longuement de manière frontale. Le tout retransmis en direct par l’ensemble des médias. Le discours de l’ex premier ministre est très haché, façon débit de mitraillette. Un règlement de compte en règle. Une salve d’attaques en piquet. Certes, il faut toujours parler en premier, mais finalement, cette petite erreur de communication de Benoît Hamon concourt à le rendre sympathique et spontané.

5Placé dans la posture du « challenger » Manuel Valls assène les coups

Au moins, la clarification entre les différentes gauches est quasi accomplie. Le moins que l’on puisse dire c’est que les programmes de Manuel Valls et de Benoît Hamon ont autant de points communs que les civilisations aztèques et les inuits. L’ancien premier ministre a profité de son discours post premier tour pour asséner ses coups et dérouler les éléments de langage qui seront les siens toute cette semaine : si la gauche veut gagner et battre Fillion et Le Pen, c’est sur lui qu’il faut parier : je suis un homme d’Etat, pas toi Benoît ; tu occultes la question du terrorisme, pas moi, etc. ; tu es communautariste, je suis républicain. En votant pour moi, la gauche a une chance de l’emporter contre la droite. La peur et la culpabilité du vote utile. Un filon vieux comme le monde. A ceci près que Manuel Valls, via cette prise de parole musclée, renforce une fois de plus ses traits de caractère repoussoir pour une partie des Français : autoritaritarisme et dirigisme. Tout ce que le peuple de gauche exècre.

 

Anne-Claire Ruel

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