Lorsque les Iraniens auront enrichi 240 kg d’uranium à 20%, ils seront très proches d’un enrichissement à 90% et pourront obtenir la quantité nécessaire pour fabriquer l’arme atomique. Au rythme actuel, cela pourrait se produire d’ici six à neuf mois. C’est la ligne rouge que Benjamin Netanyahu a tracé dans son discours de jeudi devant l’Assemblée générale des Nations Unies. Ainsi, il a d’abord calmé l’administration américaine qui craignait une intervention israélienne avant les élections de novembre aux Etats Unis. Donc, à priori, pas de guerre avant – apparemment- le mois de mars. Surtout, il a voulu se donner du temps. Ce délai permettra peut-être aux sanctions internationales de faire leur effet et d’amener les Ayatollahs à renoncer au nucléaire militaire.
En Israël, l’état-major, le Mossad et le Shin Beth sont contre une frappe en Iran, sans la participation des Etats Unis. Ils pourraient changer d’avis s’ils ont la preuve qu’il n’y a pas d’autre choix. Par exemple si les Iraniens sont sur le point d’acquérir l’arme nucléaire alors que Washington a décidé de laisser faire et Israël se retrouve seul. Il faut rappeler, à ce stade que, jamais dans le passé, Israël n’a lancé d’opération militaire sans l’accord d’au moins plusieurs généraux et des patrons des renseignements. En l’occurrence Netanyahu et Ehoud Barak, le ministre de la défense, sont seuls à prêcher l’intervention unilatérale. Et puis, six mois ne seraient pas de trop pour préparer l’arrière israélien. Près de la moitié de la population n’a pas de kits NBC. La plupart des abris doit être mis en état. Il faudra également persuader le public israélien de la justesse d’une opération qui pourrait déboucher sur une guerre régionale avec des centaines de morts, des milliers de blessés, des milliards de dégâts, une économie sinistrée. Sans parler des conséquences internationales et des réactions dans le monde arabe et, bien sûr, l’éventualité d’un échec, l’Iran accélérant la mise au point du nucléaire. Jusqu’à présent l’opinion public est partagée. Selon le dernier sondage plus de la moitié des Israéliens craint qu’une guerre mette en danger l’existence même de l’état.
D’autres considérations de politique intérieure ont aussi pu jouer dans l’établissement du calendrier présenté par Netanyahu à l’ONU. Il envisage de dissoudre le parlement et d’organiser des élections anticipées. Selon les sondages, le Likoud a toutes les chances de l’emporter alors que son taux de popularité dépasse largement celui de tous ses adversaires, à gauche et au centre. Cela, en dépit du budget d’austérité qu’il veut faire adopter au cours des prochaines semaines. La coalition droite-religieux nationalistes-orthodoxes sortirait renforcée du scrutin et aurait la majorité absolue au parlement. Le scrutin, placé sous le signe de la menace iranienne, lui donnerait ainsi la légitimité de prendre la décision fatidique et les généraux auront du mal à s’y opposer. Les Israéliens pourraient donc aller voter en février ou mars prochain. Mais, en six mois tout peut arriver. Et puis, il ne faut jamais faire des paris sur le résultat d’élections en Israël. Les électeurs israéliens ont montré qu’ils peuvent surprendre.