A en croire le grand quotidien israélien, Yediot Aharonot, le nouveau cabinet Netanyahu n’est pas seulement - avec 30 ministres et une demi douzaine de secrétaires d’état - le plus grand gouvernement de l’histoire d’Israël. C’est le plus grand au monde ! Bien sur, cela fait désordre et puis, cela coûte cher… Des milliards de Shekels pour satisfaire les appétits de tous les partenaires de cette coalition. Mais en fait, Bibi Netanyahu considére qu’il n’a pas le choix. Il a tiré les leçons de l’époque où il était Premier ministre. Souvenons-nous. Il avait remporté l’élection du 29 mai 1996 par 50,4% des voix contre 49,5% à Shimon Pérès pour perdre le pouvoir, en janvier 1999. Sa majorité avait fondu. Plusieurs députés de son parti, le Likoud, la droite nationaliste, et les formations religieuses trouvaient qu’il avait offert trop de concessions à Yasser Arafat. Dans le cadre de l’accord de Wye River en 1998, Bibi avait accepté un retrait de quelques bourgs palestiniens du nord de la Cisjordanie. Donc, en 2009, il a bétonné sa coalition à droite. Pas question de parler d’une solution à deux états ou d’une Palestine indépendante aux côtés d’Israël cela ne plairait pas à ceux qui l’ont porté au pouvoir.
Et les travaillistes ? Pas de problème ! De toute manière Ehoud Barak est plutôt d’accord avec son ancien subordonné de la « Sayeret », le commando d’état major dont il était le chef et où Bibi était capitaine. Ministre de la défense du gouvernement Olmert, le général (de réserve) Barak n’a pas fait évacuer un seul avant poste important ou réduit le nombre de barrages en Cisjordanie, en dépit des demandes répétées de la communauté internationale et notamment de l’administration Bush. Les deux hommes s’entendent bien et Bibi a été particulièrement généreux envers les travaillistes en complète déconfiture électorale. Le gouvernement peut être baptisé du titre « cabinet d’union nationale » ce qui fait de l’effet vis-à-vis du public israélien.
Le parti orthodoxe séfarade confortablement installé aux ministères de l’Intérieur, de l’Habitat et aux commandes de l’administration des domaines pourra accélérer la politique de construction dans les implantations en Cisjordanie et à Jérusalem Est. Les américains et les européens ne vont pas apprécier… Et là il faut parler de l’autre grande leçon que B. Netanyahu a tiré de son précédent passage à la Présidence du conseil. Pendant les années où il a dirigé le pays, la colonisation a été relancée. Har Homa au sud de Jérusalem a vu le jour. Aujourd’hui c’est un faubourg de plusieurs milliers d’habitants. A Ras el Amoud, en plein secteur musulman, à quelques centaines de mètres de la mosquée el Aqsa, un quartier juif a vu le jour etc… etc... Les européens avaient exprimé leur mécontentement, les palestiniens manifesté et les américains protesté. Et ce fut tout. Bibi Netanyahu est donc persuadé qu’aucune administration US n’osera imposer de sanctions à Israël. AIPAC et le Congrès à Washington y veilleront. Barack Obama peut donc répéter autant qu’il veut son soutien à une solution à deux états et que le processus d’Annapolis doit continuer !! L’Amérique devra s’y faire. Israël a voté à droite..
Bibi a l’intention de rester au pouvoir pendant les quatre années de son mandat, jusqu’en 2013. D’ici là il devrait y avoir des dizaines de milliers de colons supplémentaires en Cisjordanie et l’idée d’une Palestine indépendante s’estompera. Cela mènera-t-il à plus ou moins long terme à un état binational ? Les dirigeants du Likoud sont persuadés que non. De toute manière ils considèrent qu’un état palestinien représenterait un danger mortel pour Israël et qu’ils n’ont pas le choix. A moins que…
Charles Enderlin