Ce vendredi, les dirigeants des vingt pays les plus industrialisés du monde se préparent à une réunion tendue en marge du G20, se tenant jusqu'à demain à Buenos Aires, en Argentine.

À quoi ressemble un sommet du G20 sous l'ère Donald Trump ?

Ce vendredi, les dirigeants des vingt pays les plus industrialisés du monde se préparent à une réunion tendue en marge du G20, se tenant jusqu'à demain à Buenos Aires, en Argentine. C'est la première fois que le sommet est organisé en Amérique du Sud. Climat et commerce international seront au centre des discussions. Un an après la première participation de Donald Trump à cette réunion internationale, les membres devront de nouveau affronter ses convictions protectionnistes et climatosceptiques.  

Le G20, qu'est ce que c'est ? 

Le G20 est un forum de coopération économique et financière, crée en 1999 pour faire face aux crises qui touchaient alors plusieurs économies émergentes. Il réunit,  une fois par an, 20 membres. 19 Etats et l’Union européenne : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, États-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie et Union européenne. À elles seules, ces vingt puissances représentent  85% du PIB mondial, deux tiers de la population mondiale et 75% du commerce mondial. 

Sous l'égide du président argentin Mauricio Macri, tous les dirigeants seront présents. Donald Trump, Xi Jinping, en passant par Vladimir Poutine, Angela Merkel, Emmanuel Macron et Theresa May. Christine Lagarde, la directrice générale de FMI (Fonds monétaire international) et Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, représenteront leurs institutions. 

Depuis l'organisation du premier G20 à Washington le 15 novembre 2008, pour faire face à la crise financière mondiale, l'ordre du monde a bien changé. Le multilatéralisme a laissé place au slogan "America First", clamé par le président américain. Mais aussi au Brexit et à la montée des populismes en Europe, et plus récemment au Brésil, marqué par l'élection du président d'extrême-droite Jair Bolsonaro. 

États-Unis - Chine : le face à face 

L'un des face à face les plus attendus de ce week-end réunira les présidents des deux plus grandes puissances mondiales : Donald Trump et Xi Jinping. Si les économistes affirment qu'une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine pourrait nuire à la croissance mondiale, le président américain compte pourtant mener la vie dure à son homologue.  Dès le 1er janvier 2018, l'administration Trump relèvera ses taxes sur 200 milliards de dollars de produits chinois de 10% à 25% le 1er janvier, et menace  de taxer l'intégralité des marchandises chinoises importées aux Etats-Unis

L'entrevue entre les deux hommes d'État survient dans un contexte déjà tendu : le 18 novembre dernier, le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (Apec) avait fini dans une impasse, suite à des échanges houleux entre les représentants des deux pays. 

Donald Trump annule sa rencontre avec Vladimir Poutine

La mésentente est à son comble entre Donald Trump et Vladimir Poutine, engrenés depuis deux ans dans une affaire d'ingérence russe dans la campagne américaine de 2016. Robert Mueller, le procureur spécial chargé d'enquêter sur la possible collusion entre Moscou et l'équipe de campagne de Donald Trump, fait planer un climat de tension général au dessus de la rencontre. 

Mais en marge du sommet de Buenos Aires, un sujet sensible s'invitera autour de la table des discussions russo-américaines : Avant-hier, dans la mer Noire, trois navires ukrainiens ont été saisis par la marine russe, plus de vingt marins ont été faits prisonniers, et six d’entre eux sont blessés. Si Moscou minimise l'assaut, Kiev y voir un acte d'agression militaire. 

Dans l'attente de leur restitution par la Russie, le président américain annonçait hier sur Twitter vouloir annuler la rencontre bilatérale très attendue avec son homologue russe. 

"Compte tenu du fait que les navires et les marins n'ont pas été rendus à l'Ukraine par la Russie, j'ai décidé qu'il serait mieux pour chaque partie concernée d'annuler ma rencontre initialement planifiée en Argentine avec le président Vladimir Poutine. Il me tarde d'assister à un grand sommet aussi vite que la situation sera résolue"

Un sommet sous haute-tension  

Un an après le G20 d'Hambourg, marqué par de fortes violences urbaines, l'Argentine accueille le sommet dans un contexte économique très douloureux. La troisième économie d'Amérique Latine est en effet touchée par deux crises monétaires. Cette année, le peso a perdu 50% de sa valeur face au dollar.

Pour répondre à la présence des dirigeants des pays les plus riches du monde, plusieurs manifestations sont attendues à Buenos Aires au cours du week-end. La principale aura lieu ce vendredi, en début d’après-midi, le long d'un parcours négocié entre autorités et organisateurs. Il partira du sud de la ville pour se terminer face au Congrès, à quelque cinq kilomètres de l'endroit où se trouvent les chefs d’Etat. Plus de 22 000 policiers argentins sont déployés tout ce week-end.

Un sommet entre Donald Trump et Vladimir Poutine a eu lieu lundi 16 juillet. Photo : REUTERS/Jorge Silva

Les Américains réagissent à la rencontre entre Trump et Poutine

Le parc Lafayette, devant la Maison Blanche, est un lieu où se retrouvent manifestants, activistes et touristes. Nous nous y sommes rendus afin de demander aux Américains ce qu’ils pensent de la rencontre entre les présidents Donald Trump et Vladimir Poutine.
 Les manifestants du parc Lafayette

Depuis 1991, Philipos Melaku-Bello manifeste tous les jours devant la Maison Blanche. Le quinquagénaire a installé ses quartiers généraux - une tente entourée de pancartes anti-Trump - au parc Lafayette. En 2016, Thomas Molineaux, sexagénaire originaire du Maryland, a rejoint le manifestant.

Que pensez-vous de la rencontre entre les présidents Trump et Poutine à Helsinki ?

P.M-B: : Vladimir Poutine a tellement d’années d’expérience dans la politique, qui plus est avec le KGB, qu’il a facilement la main mise sur un politicien novice. La plus grande expérience de Donald Trump, avant d’être président, consiste à avoir accueilli les Clinton à son mariage... Je suis donc persuadé que cette rencontre n’a apporté rien de bon pour notre pays.

T.M : Je pense que les deux heures de rencontre entre les présidents étaient une farce. J’ai du mal à concevoir que le Congrès américain et les membres de son cabinet aient autorisé cette comédie. C’est la plus grande trahison que Trump ait pu faire.

Trump plaide le lapsus quant à ses affirmations sur l’ingérence des Russes dans les élections de 2016. Qu’en pensez-vous ?

P.M-B: A la minute où il a compris qu’il s’était mis les Etats-Unis à dos, en faisant ami-ami avec la Russie aux dépens de son propre pays, Trump a cherché un moyen de se rattraper. Au lieu d’admettre sa faute, il a trouvé une excuse à dormir debout. Personne n’y croit.

Dans le camp démocrate

Allison Frayton, 29 ans, est originaire de Washington D.C. Elle soutient le parti démocrate.

Que pensez-vous de la rencontre entre les présidents Trump et Poutine à Helsinki ?

A.F: C’est une aberration, une trahison et une comédie à la fois. On ne peut pas penser que cette relation puisse marcher. Les Russes ont toujours été, par définition, nos opposants. Nos idéologies ne concordent pas. Que diraient nos ancêtres qui ont vécu la Guerre Froide ? Que nos pires ennemis sont soudainement devenus nos partenaires ? Même les plus grands supporters de Trump n’y croient pas. Il nous a humiliés. Nous passons pour des faibles.

Dans le camp républicain

Plusieurs supporters de Trump n’hésitent pas à dénoncer l’attitude du président américain. C’est le cas de Mike Garlfield, 32 ans, originaire d’Atlanta (Géorgie) et Steven J. McAffee, 43 ans, de Washington D.C.

Que pensez-vous de la rencontre entre les présidents Trump et Poutine à Helsinki ?

S.J.M : J’étais persuadé que cela ne pouvait aboutir à rien de bon, et j’avais raison. Trump nous a humiliés. A présent, il cherche à rattraper ses propos avec une excuse à dormir debout. Il nous prend pour des idiots. Je suis républicain mais je ne tolère pas certaines choses. Je pense que Trump est allé trop loin et qu’il a perdu beaucoup de supporters en très peu de temps.

M.G: A vrai dire, j’étais plutôt enthousiaste à l’idée de cette rencontre. Nos deux pays sont rivaux depuis des années et ça a perduré même après la Guerre Froide. Quand j’ai su que Trump souhaitait apaiser les relations, j’ai pensé: "Enfin un président qui prend les devants." Je n’aurais jamais cru que ça allait être au prix d’une trahison.

Vous considérez donc Trump comme un traître...

M.G : Non je ne pense pas que ce soit un traître. Il a cherché à prendre la meilleure décision pour son peuple et s’est laissé aller une fois devant Poutine.

Est-ce un acte de faiblesse ?

M.G: Oui mais pas envers Poutine, envers Trump lui-même. Je pense qu'il était tellement obstiné à l’idée de mettre un terme à ces rivalités qu’il a pris une mauvaise décision et qu’il va devoir trouver un moyen de se rattraper.

A-t-il perdu votre soutien ?

S.J.M : Pour l’instant, il est certain que je ne soutiens pas du tout la façon dont il gère la situation. Il multiplie les erreurs et mensonges. Il va en falloir beaucoup avant que je puisse à nouveau lui faire confiance.

Audrey Barbieri

Donald Trump et Vladimir Poutine se sont rencontrés à Helsinki, lundi 16 juillet. Photo : Reuters/Lehtikuva/Antti Aimo-Koivisto

Donald Trump fustigé au retour de sa rencontre avec Vladimir Poutine

"Je fais confiance à mes services, mais la dénégation de Vladimir Poutine a été très forte et très puissante." Accusée d’ingérence dans les élections présidentielles de 2016, la Russie est graciée par Donald Trump. C’est du moins ce que soutiennent de nombreux politiciens américains au lendemain de la rencontre historique entre le président américain et Vladimir Poutine. Survol des réactions les plus marquantes aux Etats-Unis.

Les démocrates face à l’attitude pro-russe de Trump

Face à l’indulgence de Trump envers Vladimir Poutine, les démocrates avancent la thèse "kompromat", soutenant que la Russie détiendrait des informations compromettantes sur le président américain. Chuck Schumer, sénateur de l’Etat de New-York, parle d’un président ayant été "irréfléchi, dangereux et faible" et avance des scénarios des plus sinistres : "Des millions d’Américains vont continuer à se demander si la seule explication possible à ce comportement dangereux est la possibilité que le président Poutine possède des informations nuisibles sur le président Trump." De même, Nancy Pelosi, chef de groupe des démocrates, parle d’un "triste jour pour l’Amérique".

Un président critiqué par son camp

La décision du président peine à trouver des défenseurs même au sein de son propre parti. Parmi les Républicains, John McCain est le plus lapidaire : "La conférence de presse d'aujourd'hui à Helsinki a été l'une des représentations les plus scandaleuses d'un président américain en mémoire", a-t-il aussitôt tweeté après la conférence, rajoutant par la suite que ce dernier avait fait "le choix conscient de défendre un tyran". Arnold Schwarzenegger, acteur et ancien gouverneur, va même jusqu’à le qualifier de "chiffe molle" tandis que Paul Ryan, chef de file des républicains, rappelle au président que les deux pays sont trop opposés moralement pour pouvoir considérer la Russie comme une alliée américaine.

Les médias critiques

De leur côté, les médias, mêmes les plus conservateurs, braquent leur plume contre Trump. Vice News ou encore CNN soutiennent la thèse du "kompromat". Fox News, pourtant réputée pour soutenir des positions politiques républicaines, va même jusqu’à titrer "Ce n’est pas une façon de gagner la guerre froide", s’opposant ouvertement à l’attitude du président.

Les services de renseignements maintiennent leur position

Malgré le soutien de Trump au président du Kremlin, à peine trois jours après l’inculpation aux Etats-Unis de douze agents russes accusés d’avoir piraté des ordinateurs de responsables démocrates, les services de renseignements américains restent unanimes : la Russie a interféré dans les élections de 2016. Will Hurd, représentant républicain du Texas et ancien agent de la CIA annonce : "J’ai vu les renseignements russes manipuler beaucoup de gens dans ma carrière, je n’aurais jamais cru que le président des Etats-Unis serait l’un deux."

Audrey Barbieri