Quel avenir les onze candidats à la présidentielle envisagent-ils pour l’Union européenne (UE) ? Cette question alimente passionnément les débats politiques depuis le début de la campagne. Et le scrutin sera regardé de très près dimanche soir par les dirigeants européens. Après le vote des Britanniques pour le Brexit, plus aucun scénario ne semble impossible. Décryptage sur les différentes positions des candidats.
Les potentiels "Frexiteurs"
Jean-Luc Mélenchon propose de renégocier le projet européen dans son entièreté et une refonte des traités européens. "L'Europe, on la change, ou on la quitte" dit il. Mais ses exigences sont nombreuses, et en cas d’échec des discussions, ce qui semble probable, le candidat de la France insoumise stopperait immédiatement la contribution de la France au budget de l’UE et lancerait un référendum sur l’appartenance de la France à l’UE.
Marine Le Pen a construit sa campagne autour d’un retour à une France souverainiste, en particulier sur les thèmes migratoires et économiques. Si la vague bleue marine venait à envahir l’Hexagone, la candidate négocierait une sortie de la monnaie unique et le retour des frontières nationales en sortant de l’espace Schengen. Dans un deuxième temps seulement, les Français pourraient alors s’exprimer par référendum sur l’appartenance à l’UE.
Pour François Asselineau et Jacques Cheminade, il n’y a pas ou très peu de négociations possibles. C’est un refus total du projet européen qu’ils proposent. Ils exigeraient un retrait immédiat de la France de l’UE, de la zone euro, et sur un plan international, un retrait même de l’OTAN.
Une Europe…très différente
Pour une partie des candidats à la présidentielle, le projet européen ne représente pas un succès à long terme et doit être repensé différemment. Pour la candidate de la lutte ouvrière, Nathalie Arthaud, il faut actionner le projet des Etats-Unis socialistes d’Europe et se libérer du modèle capitaliste. En d’autres mots, seuls les travailleurs peuvent mettre en place une Europe véritablement unie et fraternelle. Dans la même optique, Philippe Poutou met en avant une coopération entre les pays pour créer une Europe des travailleurs et des peuples.
Nicolas Dupont-Aignan lui aussi voudrait repenser tout le fonctionnement des institutions de Bruxelles en supprimant, par exemple, la Commission européenne au profit du Conseil, le centre des pouvoirs nationaux en Europe. De la sorte, il préconise une Communauté des Etats européens, disposant d’une monnaie commune mais non unique. C’est-à-dire que l’Euro serait une monnaie parallèle partagée par quelques états, mais ne remplacerait pas les monnaies nationales. « Une Europe des nations », c’est aussi l’alternative proposée par Jean Lassalle qui voudrait retrouver une marge de manœuvre plus importante pour la France.
Un changement de l'UE …dans la continuité
Si de manière générale, aussi bien Benoit Hamon, Emmanuel Macron, que François Fillon se positionnent favorablement par rapport au projet européen, le candidat d’En Marche s’impose cependant comme le plus europhile des trois. Quelques points divisent en effet les trois candidats. Sur le plan de la sécurité, François Fillon prône un contrôle accru des frontières et de l’espace Schengen, pour lesquelles il voudrait récupérer une partie de souveraineté nationale. Les frontières, Emmanuel Macron, voudrait lui aussi les consolider avec une création d’une force de 5000 garde-frontières européens.
De son côté, le candidat socialiste, Benoit Hamon en appelle à une plus grande intégration économique dans la zone euro. Ceci s’établirait par la mise en place d’une assemblée démocratique représentative, un point sur lequel Emmanuel Macron rejoint Benoit Hamon. Le candidat d’En Marche veut doter la zone euro d’un budget propre, d’un parlement, et d’un ministre des Finances de la zone euro. Alors que François Fillon se veut plus pragmatique dans ses propositions : il propose un directoire politique et un secrétaire général de la zone euro.
La seule question européenne qui rassemble à l’unanimité les trois candidats, c’est la directive sur les travailleurs détachés. Tous veulent une révision de cette législation européenne qui crée une concurrence inégale entre les travailleurs européens.
Sur les traités de libre-échanges qui lient l’UE avec des grandes puissances mondiales, aussi bien Benoit Hamon que François Fillon souhaitent un abandon de ces accords très controversés tels que le CETA ou le TTIP.
De son côté, Emmanuel Macron reste un fervent défenseur de ces accords. Il se veut encore plus ambitieux pour d’autres grands chantiers européens, par exemple : lancer des « conventions démocratiques » afin de tracer les priorités d’action de l’UE ou mettre en place une défense à une échelle globale financée par des Fonds européens de défense.
Guillaume Mercier & Valéry Lerouge