Obama et le cannabis, pas plus dangereux que l'alcool

Le cannabis pas plus dangereux que l’alcool…

 "Le cannabis n'est pas plus dangereux que l'alcool", a récemment déclaré le président des Etats-Unis, qui n'a jamais caché en avoir fumé dans sa jeunesse à Hawaï, tout en précisant que cette consommation restait "une mauvaise idée". Qu'en est-il réellement ? Quel est le bilan épidémiologique comparé de l'alcool et du cannabis ? Les risques encourus sont-ils comparables ?

 Réponses d'une épidémiologiste et d'un addictologue :

 Marie Choquet : Il est toujours très difficile de comparer la dangerosité de deux substances, surtout quand ces substances produisent des effets différents et qu’elles ne sont pas consommées par les mêmes populations. Le cannabis est plutôt un produit "jeune" - même si actuellement la consommation peut concerner aussi les jeunes adultes. Les risques concernent donc des populations en pleine croissance physique, psychologique et sociale. L’alcool, en revanche, est un produit dont le mode de consommation diffère selon l’âge : les jeunes sont surtout des consommateurs occasionnels, mais en quantité importante (d’où la notion de API, alcoolisation ponctuelle importante) ; les adultes (et surtout les plus de 50 ans) sont davantage des consommateurs réguliers, voire quotidiens, mais en faible quantité (1 à 2 verres par jour). Il faut dire que l’on ne connaît les risques d’une substance qu’à partir du moment où l’on mène des recherches dans ce domaine et que le recul temporel est suffisant pour pouvoir les étudier… Ainsi, plus une substance est consommée, et ce depuis longtemps, plus ses effets sont connus ; moins une substance est consommée, et ce récemment, moins ses effets sont connus. L’essentiel du risque du cannabis est de l’ordre cognitif et psychiatrique. Il favorise les crises d'angoisse, la schizophrénie et le "syndrome amotivationnel", c'est-à-dire la perte de motivation. Fumer du cannabis occasionne une perte de la réalité et empêche de s'investir dans le travail. A long terme, le cannabis favorise, comme le tabac,  les cancers, en particulier ceux de l’appareil respiratoire. La consommation ponctuelle massive d’alcool augmente le risque immédiat d’accidents et de comas éthyliques. Si ce type de consommations s’installe, on augmente le risque de troubles d’apprentissage et de mémoire. Sur le long terme, l'alcool peut être responsable de cancers, de maladies du foie (cirrhose) et de  troubles psychiques.

 Michel Craplet : Les effets immédiats de la consommation d’alcool et de cannabis sont comparables : désinhibition, diminution de l’anxiété et baisse de la vigilance. A ces effets de comportement immédiats s’ajoutent des effets retardés pouvant aller jusqu’à la dépendance. En 1998, le Pr Roques, en comparant la dangerosité des drogues, avait établi que le cannabis était bien moins dangereux que l’alcool et que c’était le produit psychoactif qui entraînait le moins de dommages. Après cette étude française, une étude britannique allait dans le même sens par cette approche globale de santé publique. La consommation d’alcool provoque une mortalité annuelle de 30 000 à 40 000 personnes. Elle est la cause de nombreuses pathologies. Elle est à l’origine de troubles sociaux (violences, accidents de la route). Son potentiel addictif est intense et la dépendance se marque par des symptômes graves avec états de manque et troubles psychiatriques.