Dépendance aux benzodiazépines, un sevrage difficile...

Après l’arrivée dans les années 50 des traitements neuroleptiques adaptés, entres autres, aux traitements des psychoses, les années 60 correspondent à l’introduction des benzodiazépines, (BZD), pour traiter diverses pathologies comme les troubles anxieux, les syndromes de sevrage sévères… Elles ont remplacé les barbituriques aux multiples effets secondaires.

Sauf que ces molécules ne sont pas anodines. Bien tolérées, elles ont été victimes de leur succès associé à une mauvaise formation médicale dans les délais de prescription. Le risque de tolérance est très fréquent et l’accrochage tant psychologique que corporel très présent. Utilisées à faible dose, elles comportent peu d’effets indésirables et sont en général bien tolérées, tout en étant très efficaces.

Soyons clairs, cet article ne se veut pas être un guide d’arrêt ou de sevrage, (cela relève de la responsabilité médicale), mais un modeste apport d’informations pour comprendre le fonctionnement de ces molécules. Développons quelques notions :

- la demi-vie :

Les benzodiazépines ne se ressemblent pas. Leurs demi-vies les distinguent, et sont un facteur d’aggravation de la dépendance. La demi-vie est le temps mis par une substance pour perdre la moitié de son activité pharmacologique. En effet, la prise de BZD à demi-vie courte expose le patient au risque de voir son anxiété accrue, dans la mesure où il peut rapidement souffrir de manque entre les doses, ce dernier se manifestant souvent par des crises d'angoisse. De nouveau, la réponse à cette anxiété accrue, (par la BZD elle-même), sera la prise d'une autre BZD ou l’avancée de l’horaire de prise. Rarement, patient ou médecin ne songent à incriminer la molécule. C'est pourtant elle qui, la plupart du temps, est la cause de cette anxiété aggravée. Le même problème se pose pour les somnifères comme l'Imovane® et le Stilnox®. Ils agissent sur les mêmes récepteurs que les BZD, provoquent les mêmes effets secondaires et ont le même potentiel de dépendance. Dans la mesure où ils ont une demi-vie très courte, des réveils précoces sont fréquents. Ils perdent leur efficacité après quelques jours, et sont, en raison de cette demi-vie courte, contre-productifs s'ils sont pris à long terme.

- la dépression :

Une des principales conséquences de la prise chronique de benzodiazépines est la dépression. En effet, les BZD et les somnifères sont des dépresseurs du système nerveux central. Ils provoquent fréquemment une dépression chronique chez l'usager, dépression rarement identifiée comme induite par le traitement, entraînant bien souvent la prescription d'antidépresseurs, (alors que la solution est au contraire un sevrage lent des BZD).

- la tolérance :

La tolérance est LE facteur principal de l'aggravation de l'anxiété ou de l'insomnie sous BZD. La tolérance est le mécanisme suivant lequel le cerveau s'habitue à l'effet du produit, conduisant le patient à augmenter les doses pour obtenir l'effet initial. Le patient n'est pas coupable de ces augmentations mais se retrouve contraint à augmenter les doses. La tolérance à l'effet hypnotique, (qui induit le sommeil), explique pourquoi certaines personnes finissent par prendre une boîte entière, (voire plus), d’Imovane® pour trouver le sommeil… souvent en vain.

- le sevrage :

Dans les symptômes de sevrage des BZD on trouve : céphalées, douleurs et faiblesses musculaires, rebond d'anxiété, cauchemars ou rebond d'insomnie, (facteur important de reprise de la consommation), irritabilité, agitation, tremblements, anorexie, nausées, sueurs, diarrhée, changements d'humeur, dépression, dépersonnalisation, désorientation, hallucinations… La durée de la prise ainsi que la posologie sont des facteurs importants à prendre en compte, même si un syndrome de sevrage peut apparaître après un traitement de «seulement» 6 semaines.

Tout d’abord, il faut essayer de remplacer la BZD par une BZD à demi-vie plus longue pour laquelle le syndrome de sevrage est plus tardif et moins intense, puis envisager un arrêt sur plusieurs semaines, (2, 4, 6, 8, voire16), avec une diminution très progressive, par exemple de 10% tous les 3 jours, 25% chaque semaine, 1/4 de comprimé chaque semaine…

Mais chaque patient développe, malgré lui, son propre «lien» aux médicaments et chaque sevrage doit donc être individualisé. Parfois, des paliers seront nécessaires pour éviter de se retrouver trop en difficultés. Car c’est long, difficile, et les échecs peuvent naturellement décourager. Pour toutes ces raisons, il faut, à mon sens, envisager ces sevrages sur plusieurs mois, ne pas hésiter à prendre conseils auprès de spécialistes, (médecins addictologues…), et garder espoir malgré les difficultés.