Régulièrement, les médias, entres autres, nous expliquent les bienfaits des polyphénols dans le vin, dont le Resvératrol qui serait «un précieux auxiliaire pour la radiothérapie», et, «qu’exposées à cette molécule, les cellules cancéreuses de la prostate disparaissaient en plus grand nombre». Cette information émane «d’une équipe de l’Université du Missouri». Depuis des années, je peste en lisant ces articles apportant parfois une réelle information scientifique, mais également une information incomplète et surtout porteuse d’un message dangereux, considérant le vin comme un produit "alimentaire" excellent pour la santé. Le message, non subliminal, qui me gêne, étant : buvez donc du vin pour éviter, voire soigner, vos cancers !

Tout d’abord, que sont ces polyphénols et quelles en sont leurs propriétés ?

Le polyphénol est une catégorie de molécules produites principalement par les végétaux. On les retrouve en grande quantité dans :

              - le thé vert/noir, le café, le cacao,
              - les légumes et les fruits, (surtout les oranges, les kiwis, les fraises, les mûres, le raisin…),
              - les poissons…
              - et… le vin !

 Les polyphénols ont un pouvoir antioxydant supérieur aux vitamines. En clair, ils permettent :

              - un ralentissement du vieillissement cellulaire,
              - un effet préventif sur les maladies inflammatoires, les affections cardiovasculaires,
                 certains cancers,
              - l’ostéoporose,
              - etc…

 Ils ont donc un impact réel sur la santé et surtout un rôle dans la prévention de certaines maladies.

 Comment agissent-ils ?

Que veut dire, avoir un pouvoir antioxydant ? Notre corps a besoin d’oxygène pour vivre. Mais une partie de l’oxygène absorbée n’est pas utilisée correctement. Cette partie va fabriquer ce qu’on appelle des radicaux libres. Ces derniers vont assurer le nettoyage de l'organisme en éliminant en permanence les cellules anciennes ou défectueuses. Ces molécules participent ainsi aux mécanismes de défense en luttant contre les virus et les bactéries qui peuvent nous affecter. Ces radicaux libres sont donc nécessaires au bon fonctionnement de notre organisme. Dans ce travail de nettoyage, ils peuvent alors également détruire des cellules saines. Attention, car s’ils prolifèrent trop, ils peuvent favoriser l’apparition de maladies cardiovasculaires, maladies d’Alzheimer, Parkinson, cancers… Ils agissent un peu comme la rouille sur le métal et accélèrent le vieillissement cellulaire. Les polyphénols permettent donc de limiter cette action de «rouille», (d’où l’effet dit «antioxydant»), et restent alors très utiles à notre organisme.

Pourquoi l’article me pose problème ?

Force est de constater que l’on retrouve des polyphénols en grande quantité dans certains produits alimentaires, et pas seulement dans le vin. Dans l’absolu, le message n’est pas faux. Contenant des polyphénols, ce dernier est donc bénéfique pour la santé, sauf que :

 - de tels messages conduisent à considérer l’alcool comme un produit "alimentaire" au même titre que les fruits, les légumes…, ce qui est faux et dangereux : le vin n’est en aucun cas indispensable à notre alimentation même s’il peut posséder certaines vertus. Il revient à banaliser la consommation d’un produit qui peut se révéler toxique dés lors qu’un individu en consomme quotidiennement : personne ne connait sa propre fragilité, ce que nous appelons, dans notre jargon, sa potentialité addictive, et certains développeront très vite une dépendance.

- lorsque l’on connait les ravages de l’alcoolisme, le coût social, ses incidences familiales…, il est certainement préférable de conseiller de consommer des fruits et légumes plutôt que du vin. La quantité de polyphénols trouvée dans les oranges, les kiwis... est toute aussi importante que celle trouvée dans l’alcool… A une époque où les politiques de santé publiques sont très fortement orientées vers la prévention, attention à ne pas véhiculer de messages contreproductifs.

Je ne suis pas contre la consommation de vin en particulier ni contre l’alcool en général, mais je veux seulement les laisser à leur place, à savoir celle de produits à utiliser avec précaution et modération…