Depuis quelques années, la prise en charge des patients dépendants n’est plus dictée uniquement par la finalité de l'arrêt des produits.
Ce dogme de l’abstinence a longtemps empêché d’imaginer la diminution des dommages et la consommation contrôlée comme des objectifs valables pour soigner, les réduisant à des solutions illusoires en attente d’une "vraie" demande de soin.
Sans nier ni oublier d’inclure cet objectif dans le soin, l’idée d’être «là où le patient en est» a fait son chemin et ouvre d’autres portes de soin dans la prise en charge. Cette approche s’origine dans le soin aux toxicomanes avec, entres autres, la mise à disposition de matériel pour s’injecter les produits «proprement», (les salles de consommation à moindre risque en seraient le dernier modèle d’approche).
Les patients ne sont pas toujours prêts à arrêter, et penser une baisse des consommations dans le parcours de soin n’est pas chose vaine et inutile. Cette approche permet une vraie diminution des dommages liés à la conduite addictive.
Intégrer la diminution des risques aux soins n’est donc pas une sorte de "faute de mieux", mais une réorientation très profonde de la relation avec la personne addicte, une redéfinition de l’idée même du soin et de l’objectif des interventions qui s’y rattachent. Prendre en charge un patient dépendant, c’est accepter qu’il puisse être parfois, (voire souvent), ambivalent à arrêter, c'est se sortir de sa toute puissance soignante…
Penser une consommation «contrôlée» peut aussi, (surtout ?), rassurer le patient, le soignant entendant son incapacité à ce jour d’envisager sa vie sans toxique. Rien n’est plus anxiogène que de penser «lâcher» un produit devenu indispensable au quotidien. Demain est un autre jour et, peut-être, l’arrêt sera alors possible à imaginer.