Interdiction dans les lieux publics, vente dans des établissements agréés, accès interdit aux mineurs... Les experts recommandent un strict encadrement.
Si son utilisation en France "ne doit pas être interdite", la cigarette électronique doit faire l'objet d'un encadrement assez strict, selon des recommandations d'experts rendues publiques mardi 28 mai. Le Pr Bertrand DAUTZENBERG, Pneumologue et Président de l'Office Français de Prévention du Tabagisme, présente 28 recommandations sur l'utilisation de cette cigarette qui connaît un engouement croissant mais divise les tabacologues. Inventé en Chine en 2005, l'appareil présente à son extrémité une diode simulant visuellement la combustion et contient une cartouche dont la solution s'échauffe au contact d'une résistance. Des flacons de "e-liquides", composés de propylène glycol ou de glycérol, de divers arômes et éventuellement de nicotine, permettent de recharger la cartouche usagée. Selon les fabricants, le produit serait utilisé par 500.000 personnes en France, mais pour Bertrand DAUTSENBERG, le nombre d'utilisateurs pourrait d'ores et déjà atteindre le million, avec un chiffre d'affaires avoisinant les 100 millions d'euros, équivalent au marché des produits permettant d'arrêter le tabac. Quant à son efficacité pour arrêter de fumer et sa nocivité, elles continuent à faire l'objet d'un vaste débat.
Interdiction dans les lieux publics
Les experts recommandent que l'utilisation de la cigarette électronique soit soumise aux mêmes restrictions que celle du tabac : elle devrait donc être "interdite dans les endroits où il est interdit de fumer".
Vendue dans des établissements agréés
Le comité d'experts demande qu'elle ne puisse être vendue que dans des établissements agrées et non plus "dans les supermarchés et autres boutiques généralistes" comme c'est le cas actuellement. D'abord distribuée sur internet, elle dispose désormais d'enseignes dédiées de plus en plus nombreuses. Selon le Pr DAUTSENBERG, cité par Le Point, on compte aujourd'hui quelque 150 points de vente en France, contre une centaine en décembre 2012 et un seul en janvier 2010.
Interdite aux mineurs
Le rapport préconise également son interdiction aux mineurs de crainte qu'elle ne favorise l'initiation au tabac. Le Pr DAUTSENBERG se déclare extrêmement réticent en ce qui concerne les mineurs pour lesquels la e-cigarette constitue "un boulevard d'entrée potentiel dans le tabagisme". Selon une étude récente faite à Paris, 64% des jeunes de 12 à 14 ans qui avaient essayé la e-cigarette n'avaient encore jamais fumé auparavant, souligne-t-il.
Publicité interdite
Les règles s'appliquant à la publicité pour le tabac doivent également être transposées à la cigarette électronique, selon le rapport. Autrement dit, la e-cigarette doit tomber sous le coup de la EVIN de 1991 selon laquelle "toute propagande ou publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac ou des produits du tabac ainsi que toute distribution gratuite sont interdites", y compris dans les points de vente.
Une innocuité à prouver par les fabricants
Les recommandations incluent l'obligation pour les fabricants d'apporter la preuve de l'innocuité des arômes utilisés et de limiter, hors statut de médicament, la quantité de nicotine utilisée à 18mg/ml contre une concentration maximale actuelle de 20 mg/ml sur les ventes dans les magasins spécialisés en France.
Une utilisation impropre pour arrêter de fumer
Un projet de directive européenne propose même d'abaisser ce taux à 4mg/ml, ce qui dissuaderait totalement les fumeurs, selon Bertrand DAUTSENBERG. Le pneumologue souligne également que l'utilisation de la forme liquide est "un moyen propre de prendre de la nicotine" surtout pour les gros fumeurs. En 2008, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait estimé que ces cigarettes ne pouvaient pas être considérées comme une thérapie légitime permettant d'aider les fumeurs à cesser de fumer. Elles sont interdites dans plusieurs pays, dont la Turquie, le Brésil, l'Argentine et Singapour.