Le Guide des 4000 médicaments, pavé dans la mare et success-story éditoriale

Dans un laboratoire de médicaments génériques (AFP/AuteurPHILIPPE MERLE)

A 68 et 80 ans, les professeurs Bernard Debré et Philippe Even entament avec bonheur une carrière d'auteur de best-sellers.

Sorti le 13 septembre à 20.000 exemplaires, propulsé par la Une du Parisien et un dossier spécial de l'Obs, leur Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux a désormais dépassé les 200 000 exemplaires, selon les éditions du Cherche-Midi, et trône au sommet des meilleures ventes essais de Livres Hebdo. Les recettes du succès ?

Un bon lancement

Le 13 septembre, il fallait être sourd et aveugle pour n'avoir pas entendu parler du dossier spécial que Le Nouvel Observateur consacrait au livre, sans parler de la une du Parisien clamant qu'"un médicament sur deux est inutile, selon deux spécialistes" .

Un excellent lancement prolongé par un service après-vente sans défaut. Bernard Debré, qui connaît en fin politique les ficelles médiatiques et en médecin expérimenté les angoisses des patients, n'a pas hésité à surenchérir. Et à répéter sur toutes les ondes que 50% des médicaments ne servaient à rien, et risquaient parfois de nuire, sans craindre d'attiser les peurs du consommateur (et lecteur potentiel).

Une bonne polémique

Loin de desservir l'ouvrage, la polémique qui a suivi a servi sa notoriété. Car le livre, évidemment, a fait hurler l'industrie pharmaceutique (à quand son Guide des médecins utiles, inutiles ou dangereux ?) et  bondir quelques spécialistes. Dans Le Figaro, le professeur Éric Brucker (du service d'endocrinologie à La Pitié-Salpêtrière) a jugé "terriblement faux" "le message de fond concernant le cholestérol et les maladies cardio-vasculaires" et dénoncé des approximations "que l'on accepterait mal d'un étudiant en médecine". 

Les auteurs, eux, défendent bec et ongles la qualité de leur travail. Philippe Even évoque "un travail de bénédictin: "On a décidé d'étudier les médicaments un par un, analysé 20 000 références internationales sur les médicaments. J'ai travaillé 12 à 15 heures par jour pendant un an."

Les raisons du succès ? "Avec Bernard Debré, on avait déjà écrit trois livres sur les médicaments depuis 2002, qui n'avaient pas dépassé les 10 000 ventes. Ce qui s'est passé cette fois-ci ? Le scandale du Mediator. Les gens ont dans l'idée qu'on ne leur dit pas tout, entre langue de bois de l'Agence nationale de sécurité du médicament et lobby pharmaceutique. Qu'on en ait vendu des milliers d'exemplaires le premier jour, ça montre une panique. On pose à la fois des questions de santé et des questions économiques: il y a au bas mot 10 milliards de dépenses inutiles dans le médicament."

Les critiques ? Balayées d'un revers de phrase : "On les a prises à la rigolade. Ce sont les responsables de ce gâchis qui nous critiquent ?  Et maintenant ils disent qu'ils vont faire un livre blanc ? Comment ça se fait que l'Agence nationale de la Santé  n'ait pas encore fait ce guide ?"

Une bonne suite

En attendant le guide officiel des 1000 principes actifs réclamé par plusieurs médecins dans Le Journal du dimanche du 7 octobre, l'éditeur entend exploiter le filon. Le Guide des 4000 médicaments devrait donc être décliné sous forme d'application iPhone d'ici la fin de l'année, et republié l'an prochain en version actualisée (et éventuellement rectifiée ?).

Egalement dans les cartons, la parution en janvier d'un livre portant uniquement, nous a expliqué Philippe Even, sur le cholestérol "parce que c'est le point le plus discuté". Et aussi le plus vendeur, avec des millions de Français concernés.

Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux des professeurs Philippe Even et Bernard Debré, Le cherche-midi (23 euros).

 

Publié par Anne Brigaudeau / Catégories : Actu / Étiquettes : Debré, santé