De garde aux urgences, je vais voir mon prochain patient.
Je rentre dans le box et me retrouve face à un jeune homme, un grand black baraqué, de mon âge à peu près (je sens déjà que la situation va être un peu gênante...)
Comme à chaque début d’entretien, je lui demande:
" Alors qu’est-ce qui vous amène ici Monsieur ? "
Celui-ci, me paraissant très gêné, me répond :
" Bon franchement mademoiselle, je suis hyper gêné de devoir vous dire ça...c’est pas possible que j’ai un autre médecin, genre un mec, plus vieux ? "
" Ah non monsieur, chacun est ici médecin, y compris moi, et vous ne pouvez pas choisir votre médecin. Dites moi ce qui vous amène, vous savez, il n’y rien de gênant, je suis là pour vous aider et vous soigner. "
" Bon, ok si j’ai pas le choix…mais vraiment ça me gêne...bon voilà en fait ça fait 4 jours que j’ai pas été…vous voyez quoi ? "
" Non…pas été où ? A la selle ? Faire caca ? "
" Oui c’est ça, et là j’en peux plus, j’ai un mal de bide phénoménal, c’est horrible, faut faire quelque chose pour moi "
Après quelques questions pour juger de la gravité de la situation, j’en conclus qu’il est nécessaire que je complète mon examen clinique par un toucher rectal. Oui, moi-même, à ce moment, je me dis dans ma tête que cette situation n’est pas des plus simples…Mais je n’ai pas le choix, c’est important , ça fait partie de l’examen clinique.
J’explique donc à mon patient que je vais devoir lui faire un toucher rectal.
Et là, je le vois bondir !
" Ah non, c’est impossible là ! C’est mort mademoiselle. C’est trop la honte, mais vous vous rendez compte ! "
" Monsieur, je comprend votre gêne, mais c’est important ; c’est un acte médical, pour vous soigner. "
" Mais c’est vraiment la honte…j’aurais jamais pensé que j’en serais là un jour. "
" Bon ça va monsieur, on va pas y passer des heures (sentant que moi aussi, plus je mettais d’efforts à le convaincre, plus la situation se compliquait). C’est pour vous, pour vous soigner. "
"...Bon ok, j’ai pas le choix ."
L’examen étant fait, rassurée, je lui annonce qu’il va pouvoir rentrer chez lui avec les médicaments adéquats.
Il me répond alors:
" Ok, je ne veux qu’une chose, partir d’ici. Et jurez moi une chose mademoiselle, j’espère qu’on se recroisera jamais dans la rue, ou vous ferez semblant de pas me reconnaître, parce que là c’est trop trop la honte ! "
Ah...pas évident certains examens cliniques dans certaines situations 😉
Mais n'oublions pas que ces actes restent médicaux avant tout, et sont bien nécessaires.