Klee du succès

J'avais renoncé depuis un moment aux expo, bouée de sauvetage pour les parents affublés d'enfants en bas âge. Il faut bien avouer que, pendant la visite, j'avais plus mon danger public de fille dans le viseur que le talent artistique du peintre. Du genre à aller couler un bronze dans l'urinoir de Duchamp dès que j'ai le dos tourné. J'étais tellement aux aguets qu'il était devenu impossible de me souvenir d'une seule peinture après l'expo. Autant regarder les toiles sur google images, c'est bien moins fatiguant.

Mais l'expo Paul Klee à la Cité de la musique nous semblait pas trop ambitieuse. Elle était surtout à trois stations de métro de la maison. Si on avait pris cinq minutes supplémentaires pour se renseigner, on aurait regarder le sous-titre "Polyphonies". Comme ça, on aurait pris les audioguides pour écouter les morceaux qui correspondaient à chaque toile. Mais comme on était en mode "périmètre de sécurité", c'est à peine si j'ai eu le temps de voir l'air étonné de l'hôtesse à qui je refusais les écouteurs.

Le truc pas cool : mon fils s'est trainé par terre en disant qu'il n'y avait que celle-ci et celle-là qu'il aimait bien. La réaction cool : la mamie qui dit "Aimez deux peintures de Klee à son âge, c'est déjà magnifique."

Le truc pas cool : On a regardé un petit docu qui évoquait le goût pour la musique de Paul Klee. Ma fille a hurlé "Beethoven" avec un air éclairé quand le nom du compositeur a été prononcé. La réaction cool : les visiteurs nous ont regardés avec un air mi-admiratifs, mi-envieux, pas sûrs de pouvoir faire un jour une petite fille de 2 ans et demi aussi brillante. Alors que nous, on savait très bien que ça lui avait juste rappelé le saint-bernard du film Walt Disney qu'on a à la maison.

© Emma Defaud

Mais le moment définitivement le plus cool, c'est après l'exposition, quand on a découvert l'atelier au sous-sol. Une dizaine d'exercices ludiques vraiment top étaient présentés. Une peinture de Klee à finir avec des marqueurs effaçables, un mémo sonore, un théâtre de marionnettes, des jeux sur ordinateur, un vidéo projecteur pour créer sa propre oeuvre avec des calques de couleurs. C'était tellement bien que j'ai dû me faire violence pour ne pas (trop) jouer à la place des enfants. Pas trop. Pour la première fois de leur vie, mes mômes ont déjeuné à 14h passés sans pleurer ni hurler à la mort. J'ai dû les extirper sous la menace pour les amener manger des pâtes au resto. Menacer pour manger des pâtes au resto. Tous les mots de cette phrase sont antinomiques.

PS 1 : Ceci n'est pas un billet sponsorisé, juste un coup de coeur.

PS2 : Même si la bande annonce de Beethoven vous semble sympa, sachez que ce film est une sombre merde dans laquelle la seule place de la mère est à la maison pour s'occuper de l'éducation de ses rejetons. Mais à 10 ans, j'étais fan.